Intérieur – 1964-65 Richard Hamilton

Richard Hamilton (1922-2011)

 

Intérieur

1964-1965

Sérigraphie sur papier

Dim 49,1 x 63,8 cm

 

Conservé à la Tate Modern à Londres

 

L’artiste

Richard Hamilton, peintre et graphiste, est l’un des premiers créateurs du Pop art en Angleterre. Hamilton commence son apprentissage du dessin en 1929, à 16 ans il prend des cours du soir avant d’étudier la peinture à la Royal Academy School en 1938. Après s’être fait renvoyer de la Royal Academy School, il poursuit son éducation à la Sade Scholl of Art de Londres entre 1948 et 1955. Il réalise les illustrations du livre de James Joyce intitulé Ulysse. Et commence à exposer ses œuvres à l’institut d’art contemporain de Londres.
Parallèlement à sa carrière artistique, il enseigne, diffuse et met en espace l’art de son temps :
En 1952, il est instructeur à la Central Scholl of Arts and Crafts à Londres. Il fonde avec Paolozzi, l’Indépendant Group qui s’intéresse aux liens entre art et technologie ; adhèrent à ce groupe le critique d’art Lawrence Alloway et les architectes Alison et Peter Smith. Le sujet passionnera toujours Richard Hamilton qui sera dès 1980 un des premiers artistes à utiliser les possibilités des ordinateurs.
Dans les années 50, il fait des rencontres décisives pour sa carrière artistique comme William Turnbull (peintre et sculpteur écossais) et la découverte des œuvres de Marcel Duchamp.
Le début de sa notoriété démarre en 1956 avec un petit collage (26 x 24,8 cm) intitulé Just What it is That Makes Today’s Home so Different, so Appealing ? (Qu’est ce qui rend les intérieurs d’aujourd’hui si différents, si séduisants ?).
De 1957 à 1961, il est professeur de design d’intérieur au Royal College of Art, à Londres.
De 1853 à 1966, il est maître de conférence, département des beaux-arts au King’s College
En 1962, il voyage aux États-Unis où il se lie d’amitié avec Marcel Duchamp.
Le tableau AAH -1962, illustre ses pensées sur la culture populaire de l’époque.
En 1966, il achève la reconstruction du Grand-Verre de Marcel Duchamp et présente toutes ses études à la Halton Gallery, Newcastle-upon-Tyne, Royaume-Uni.
En 1968, les Beatles lui demandent de réaliser la couverture de leur album
White Album
Durant la seconde guerre mondiale, il est l’un des dessinateurs scientifiques dans le secteur acoustique et contribua à la conception des premiers transistors anglais.

La plupart des œuvres de richard Hamilton sont exposées à la Tate Gallery de Londres, au Met et au MoMA de New-York.

 

Le tableau

Cette œuvre composée d’une sérigraphie sur papier, a été inspirée par le film Shockproof, réalisé par cinéaste allemand Douglas Sirk en 1949.

L’idée d’Hamilton était de créer une pièce sinistre pour le regardeur, en utilisant des photographies et des publicités tirées de magazines américains.

Initialement conservée à la Tate Gallery, l’œuvre est aujourd’hui visible à la Tate Modern à Londres.

 

Composition

Pas de perspective, pas de plans

Une accumulation d’objets, un méli-mélo ponctué par la présence d’une femme élégante qui donne un sens à ce désordre.

Des morceaux de photos découpés et collés selon l’humeur de l’artiste.

Les lignes verticales et horizontales se heurtent de façon abrupte. Renforcées par les couleurs, elles donnent au photomontage une certaine énergie.

L’artiste suggère au regardeur un foyer idéalisé et opulent.

Un puzzle avec des vases de fleurs, une télévision, des tapis modernes rouge et jaune et une reproduction de tapis persan, un bureau, des piles de magazines etc…

 

Analyse 

Hamilton réalise une sérigraphie distanciée et ironique d’un idéal de foyer moderne qui coche la case du Pop art.

Inventés par les cubistes et adoptés par les surréalistes, le collage et l’assemblage connurent un succès international au cours du XXe. Les associations d’objets en trois dimensions (assemblages) furent un moyen d’expérimenter l’ajout d’éléments de la vie réelle dans le plan du tableau, tandis que les collages photographiques (photomontages) permirent de questionner et de commenter la réalité.
Assemblage et photomontage furent les successeurs évidents des papiers collés originaux des cubistes.

Dans cette sérigraphie sur papier, des vases de fleurs, des tableaux et une télévision s’associent aux meubles d’un intérieur et à une femme impeccablement vêtue pour suggérer un foyer idéalisé et opulent.

Cependant, ce style de vie est représenté comme un environnement produit en masse : les tableaux sont en fait des photographies et le cadre de la porte est une sérigraphie, comme les rectangles rouges et jaunes qui recouvrent le sol. Le tapis persan est une reproduction des milliers d’exemplaires parus dans une revue contemporaine et ici collée sur la surface, et la télévision assure que les images projetées dans chaque salon sont universelles.

Hamilton suggère que la beauté de la femme et des autres objets est fausse, produit de séances photographiques pour une revue de luxe.
La femme est collée sur un espace qui n’existe pas.

Hamilton utilise le photomontage pour critiquer le rôle des médias dans la définition de la société. Pour ce faire, il utilise  les motifs du Pop Art :  des objets de la vie quotidienne et des nouveaux équipements façonnés par la société de consommation.

En démembrant la photographie, un support réaliste et documentaire, le photomontage parvenait à déconstruire et à recréer la réalité tout en offrant des commentaires politiques et absurdes.

Hamilton reflète la nouvelle ère de consommation, les objets produits en séries, les publicités, deviennent des objets artistiques à part entière.

L’objet dans sa matérialité devient le centre de l’étude d’Hamilton.

L’artiste utilise l’ironie pour montrer comment cette prospérité arrive à contrôler le quotidien des citoyens dans leur style de vie de plus en plus uniforme.

En mélangeant les beaux-arts et la culture populaire Richard Hamilton définit le Pop art.

Le Pop art reflète l’époque dans laquelle il émerge, tout en la critiquant ou l’idéalisant.
Le Pop art est une réaction face à l’homogénéité qui s’impose au sein de la société, consommant les mêmes choses et obligeant à un certain conformisme.

Hamilton manipule et déforme les images proposées par les mass-médias, les restitue sur des fonds colorés en les vidant de leur contenu émotionnel.

Hamilton est un pionnier dans la réinterprétation critique des images séduisantes de la consommation de masse.

Il fait une interprétation  critique des images symboles de la modernité.
Avec le mythe collectif, comme celui de Marilyn, il l’utilise sa photographie de façon dramatique pour souligner toute sa tragédie. My Marilyn -1965

Hamilton décrit le Pop art : « Le Pop art est : Populaire, éphémère, consommable, peu coûteux, produit en masse, jeune, spirituel, sexy, gadget, glamour et Big Business ».

Cette définition qui reflète l’esprit du mouvement Pop art, est aujourd’hui la définition standard.

Richard Hamilton compte parmi les précurseurs les plus importants du pop art européen.

Le pop art se développe pleinement dans les années 60 et se caractérise par la négation de toute référence à l’émotion subjective, ainsi que par la large utilisation d’images et d’objets liée aux communications de masses et à la vie quotidienne.

 

Conclusion

Après l’Angleterre le langage pop se diffuse à partir de 1959-60, aux États-Unis, avec la peinture de Hopper et de Sam Davis.

La transition de la culture figurative informelle à la culture pop est représentée par la production de Robert Rauschenberg et Jasper Johns Cible à quatre faces –1955.

« Les principaux représentants du Pop art américain sont George Segal, James Rosenquist, Roy Lichtenstein et Andy Warhol, pour ne citer qu’eux. Segal construit des plâtres grandeur nature de figures humaines, Rosenquist projette sur d’énormes affiches des images banales et emploie la technique de superposition et du montage pour les charger d’une simplification menaçante, Lichtenstein réalise une analyse linguistique démystifiante des images de bandes dessinées, Warhol s’intéresse au problème de la répétition et produit le même sujet en longues séries de photogrammes pour signifier l’absence du signifiant.

Le Pop art annonce le tournant culturel de 1968, qui marque aussi son dépassement. »