Impression, soleil levant -Monet

Claude Monet (1840-1926)

 

Impression, soleil levant

1872
Huile sur toile
Dim. 48 x 63 cm
Conservée au musée Marmottant

 

Claude Monet

1840 Naissance à Paris. Enfance au Havre.
1859 Eugène Boudin qui l’entraîne à peindre en extérieur, lui conseille d’aller à Paris. Monet prend des cours à l’académie Suisse puis chez Charles Gleyre.
Il rencontre le peintre Jongkind
1865 Il rencontre Camille Doncieux qui devient son modèle
1866 1er succès au salon de peinture et sculpture avec Femme en robe verte
1870 Il épouse Camille Doncieux et fuit la guerre à Londres.
Il y rencontre Paul Durand-Ruel qui devient son marchand d’art.
Il observe les tableaux de W. Turner
1871 Retour en France
1874 Il participe à la 1er exposition organisée dans l’atelier de Nadar. L’exposition rassemble les futurs peintres « impressionnistes ».
1878 Il emménage avec sa famille et celle d’un mécène Ernest Hoschedé dans une maison commune à Vertheuil. Il peint la seine et la côte normande
1883 Il s’installe définitivement à Giverny
1890 Monet se consacre à des séries de peintures.
Il commence par les Meules et enchaine avec les séries des Peupliers, de la   Cathédrale de Rouen, du Parlement de Londres et des Nymphéas de son jardin.
Monet est atteint par la cataracte à la fin de sa vie
1926 Il meurt d’un cancer pulmonaire à Giverny

 

 

Introduction

Peint en 1872 cette marine industrielle tient une place importante dans l’histoire de l’Art. C’est le tableau le plus connu du peintre Claude Monet.
Initialement Monet avait nommé cette toile Vue du Havre.
Pour son exposition en 1874 à la « société anonyme des artistes peintres, sculpteurs et graveurs » organisée dans l’atelier du photographe Nadar, Monet indiqua dans le catalogue : Impression
Impression, soleil levant 
est l’oeuvre fondatrice du mouvement Impressionniste.
Monet a peint cette toile en quelques heures de la chambre de son hôtel sur le quai du Havre sans se douter que son tableau marquerait un véritable tournant dans l’histoire de l’Art.
C’est un peu comme s’il y avait eu 2 Renaissances : la Renaissance italienne et, au XIXe, la Renaissance française.

 

Composition

Le soleil levant est le point d’accroche du tableau
Il se distingue par sa couleur chaude et sa netteté, par contraste avec l’atmosphère froide et brumeuse du port.
Les études topographiques confirment qu’il s’agit bien du soleil levant et précisent que sa représentation a eu lieu 30mn après l’aube le 13/11/1872 à
7H35 du matin

La composition se caractérise par l’horizontalité du paysage.
Le tableau est partagé en trois.
Le ciel constitue le tiers supérieur. Sont reptrésentés au milieu le port et au premier plan la mer.

Le ciel est représenté par de larges touches ocres.
Le port est enseveli dans un brouillard bleuté.
La mer est matérialisée par de petites vagues faites de coups de pinceau rapides et de couleurs froides et contrastées.
Seul le disque orange et plat du soleil se détache des tons froids.

Au premier plan, au centre du tableau se dégage en silhouette une figure conduisant une barque à la godille. Un peu plus loin, décalée sur la gauche du tableau, une seconde barque donne un effet de profondeur.
L’effet de profondeur est également marqué par deux lignes : une ligne d’eau plus claire dans le prolongement de la barque du premier plan emmène le spectateur dans le chenal qui sépare le port en deux quais; et, passant devant la barque, une ligne de lumière -tracée des quais au premier plan,  formée par les reflets du soleil et du ciel dans l’eau, éclaire le tableau.

Au milieu, le port du Havre avec dans les lignes de fuites un jeu de verticales qui figurent les mâts des voiliers à quai, les grues sur les docks et les cheminées des usines.
Le tableau est noyé dans la brume matérialisée par un camaïeu de gris bleuté.
Seule note chaude, excentrée sur la droite du tableau dans le plan du port, la couleur rouge-orangé du soleil es ses reflets dans l’eau.

 

Analyse

Vue du port du Havre au petit matin, la composition réunit tous les ingrédients qui feront de l’Impressionnisme le style précurseur de l’art moderne : un paysage aux airs d’esquisse peint en plein air par l’artiste, des coups de pinceaux secs qui témoignent de la patte du peintre, des effets de flou, des couleurs qui s’entrechoquent sur la toile au lieu de se mélanger au préalable sur la palette.
Tout est esquissé, il n’y a pas de détail, les silhouettes des bateaux se détachent à peine du reste du tableau, baignées dans le flou de l’atmosphère du port.
Ce sont les effets de l’air, de la lumière et des reflets qui intéressent le peintre. Ils sont le sujet du tableau. Les variations de tous ces éléments, fugitives sont saisies dans l’instant par Monet. Il pose la peinture sur la toile par petites touches de couleur parfois épaisses. Il utilise les couleurs du spectre solaire et les juxtapose selon la loi des complémentaires.
Monet peignait en extérieur pour mieux s’imprégner de l’atmosphère du paysage.
Monet est un chasseur de lumières. Il peint la vie en évolution. IL « ouvre » ses tableaux et peint l’univers lumineux qu’il voit autour de lui. Il travaille la transparence de l’eau. L’eau naît avec la lumière qui la révèle.
Sa facture est proche de l’esquisse. On sent dans la touche fragmentée la volonté de rendre l’instant d’une atmosphère particulière, une sensation unique, une « impression ».
Monet est attentif à laisser la plus grande place possible à l’imagination du spectateur.

 

Conclusion

Monet donne un aspect non-fini à la toile en utilisant une touche rapide. C’est la technique des Impressionnistes. Une peinture très fluide, très esquissée, d’un seul geste, rapide, qui pose le motif.
Les peintres impressionnistes peignent en extérieur et rapidement.
Chez Monet les touches sont longues, il emploi des couleurs contrastantes pour imiter les mouvements de l’eau, ses reflets et le papillonement de la lumière.
Cette technique est révolutionnaire, elle préfigure le pointillisme que G. Seurat utilisera dans les années 1880.
Mis à part les silhouettes à contre-jour et le soleil en forme d’orange sanguine qui distille ses reflets sur l’eau, Impression soleil levant entremêle ciel et mer dans un magma de tons bleutés et rosés qui relève presque de l’abstraction.
De quoi scandaliser une partie de la critique, en fasciner une autre et entrer dans l’histoire de l’art en claquant la porte de l’académisme.

 

Le Rêve – Douanier Rousseau

Henri-Julien-Félix Rousseau dit le Douanier
(1844-1910)

Le Rêve 
(1910)
Huile sur toile
Dim 298,50 x 204,50 cm
Conservé au Muséum of Modern Art New York

Le Douanier Rousseau

1844 Naissance à Laval
1860 Prix de dessin
1886 Il expose régulièrement au Salon des Indépendants. 1er succés avec
Un soir au carnaval. Camille Pissarro et Odilon Redon le remarquent.
1871 Il entre dans les services de l’octroi à Paris, d’où son surnom de Douanier
1884 Il obtient une carte de copiste au Louvre
1893 Il se consacre entièrement à son art
1905 Il présente trois toiles au salon d’Automne
1910 L’année du Rêve il meurt à Paris

Rousseau est un peintre autodidacte. Il exerçait la profession de douanier.
Il n’a jamais voyagé. Il compose ses tableaux à partir de photographies découpées dans la presse ou à partir de ses observations au jardin des Plantes.
Rousseau se proclame peintre « réaliste » .
Il peint des portraits, des paysages urbains et de grands tableaux de jungles devenus célèbres.

Description

Cette oeuvre appartient à la série des jungles que Rousseau peindra toute sa vie. Le Rêve est l’une des dernières.
C’est un tableau de grande dimension.
Rousseau représente une femme nue sur un canapé rouge, encerclée de lotus géants, au milieu d’une jungle luxuriante et foisonnante d’animaux dissimulés dans les hautes herbes et les arbres de la forêt. Tout y est : les fruits, les oiseaux, le serpent, les lions, le son harmonieux de la flûte et la nudité.

Composition

Le chromatisme de ce tableau est unique.
La couleur verte est omniprésente. Elle est déclinée en plusieurs nuances, de la plus lumineuse à la plus foncée.
Rousseau marie le vert avec le bleu et les couleurs complémentaires. Ce qui lui permet de mettre en évidence certains détails comme le serpent orange ou les fruits. Ces procédés créent une harmonie parfaite.

Les paysage est figé, habité de personnages et d’animaux (la femme, le joueur de flûte, les lions, l’oiseau) échappant à toute loi de perspective.Il n’ya pas de profondeur de champ. La femme et la flore font le tableau et constituent le décor.

Au premier plan, à gauche du tableau, la femme nue est allongée sur le canapé rouge.Elle est lascive et semble flotter sur un océan végétal. Elle regarde à droite et tend la main en direction du joueur de flûte (au second plan, dissimulé par la végétation). Il est revêtu d’un pagne bariolé.
La femme est mise en valeur par la couleur du canapé et la verdure rafraichissante.
Il y a un contraste fort entre le clair et l’obscur souligné par les contours renforcés par un liseré lumineux.

Analyse

Dans la clarté éclatante d’une nuit de pleine lune Rousseau nous raconte une histoire onirique.
La jeune -femme est transportée dans un univers charmeur, telle Eve installée sous l’arbre du péché. Elle a une posture d’invitation.
Yadwigha semble retrouver son paradis perdu.
Yadwigha. serait une allusion au dernier amour du peintre. Le rêve suggérerait le trouble émotionnel dans lequel Rousseau était plongé à la fin de sa vie.

Cette peinture est un rêve sensuel, tropical et parfait. Tout est beau, mystérieux et séduisant dans ce tableau.
C’est un tableau d’évasion hors de la réalité pour le peintre.
Dans le monde de Rousseau les oranges poussent sur les acacias.
Le message transmis est un message d’exotisme, de sensualité et de
tentation (le serpent). Cette nature imaginaire symbolise le paradis perdu.

Bien que la toile soit très réaliste, Rousseau nous offre du rêve. Rousseau réalise ses fantasmes à travers sa peinture et offre au spectateur de partager le même Imaginaire

Rousseau ne s’embarrassasse pas  de perspective. Il pose ses couleurs en a-plat comme pour du papier peint. C’est un coloriste. Son trait est précis. Sa palette est d’une étonnante richesse. Dans le rêve il y a de nombreuses nuances de vert.

Le  MoMA conserve à la fois Les demoiselles d’Avignon de Picasso et Le Rêve du Douanier Rousseau
Si on compare ces œuvres d’un point de vu intentionnel, la motivation Des demoiselles est évidente : marquer une rupture dans la peinture, faire bouger les lignes, être le chef de file d’une nouvelle école.
Le Rêve est à l’opposé de cette idée. Il propose un univers fantastique au spectateur privé de rêve.
Rousseau est l’anti-Picasso

Conclusion

A la fin du XIXe un courant, le « primitivisme ». qualifié de naïf (1855-1930) prit forme. Le Douanier Rousseau en est un des représentants.

Le Rêve est l’une de ses dernières toiles. Rousseau laisse vagabonder la création. Le nu sur un canapé au milieu d’une jungle totalement mythique est, une projection de l’inconscient. C’est une jungle onirique.

Le Rêve est l’oeuvre la plus emblématique du Douanier Rousseau. Le dernier de ses tableaux à avoir été présenté au Salon des Indépendants en 1910, l’année de sa mort.

Comme les Impressionnistes Rousseau s’intéresse d’abord aux paysages mais, contrairement aux Impressionnistes qui diluent les formes et accordent peu de place au dessin, Rousseau dessine minutieusement les paysages.
Rousseau ne maîtrise pas la perspective mais, il utilise la couleur de façon intuitive. Ces multiples nuances de vert s’harmonisent parfaitement.
Rousseau possède le sens de la composition et ses maladresses sont compensées par la justesse chromatique de ses tableaux.
Le Douanier Rousseau artiste naïf fait preuve d’une grande sensibilité artistique, il est le précurseur des surréalistes.

Au début du XXe sa peinture suscite l’intérêt de l’avant -garde artistique qui se passionne pour les arts primitifs.
Guillaume Apollinaire, Paul Signac, Robert et Sonia Delaunay et Picasso s’intéressent aux tableaux du Douanier Rousseau