Cassone Adimari – 1440-1450 – Lo Scheggia

Lo Scheggia (1406-1486)

 

Cassone Adimari 

1440-1450

Tempera sur panneau
Dim 88 x 302 cm

Conservé à la Galleria dell’Accademia de Florence 

 

 

Le peintre 

Giovanni di ser Giovanni Guidi dit le peintre Lo Scheggia
C’est un peintre italien, jeune frère de Masaccio.
En 1417, il intègre l’atelier de Bicci di Lorenzo à Florence.
En 1426, il est à Pise.
En 1429, il ouvre son propre atelier à Florence.
En 1430, il est inscrit à la Compagnie di San Luca.
Entre 1436 et 1440, il fournit les cartons pour les statues de la sacristie de la Cathédrale Santa Maria Del Fiore.
Dans cette période, il produit pour ses commanditaires florentins, surtout des cassones et du mobilier de luxe, pendant qu’il réalise des retables et des fresques pour la province comme le Martirio di San Lorenzo de l’église San Lorenzo à San Giovanni Valdamo.
En 1449, à l’occasion de la naissance de Laurent de Médicis, il réalise le Desco da parto avec le Trionfo della Fama.

 

 

L’œuvre 

Cette œuvre a été exécutée lors d’un mariage de la famille Adimari en 1420.
Il s’agit en fait du centre d’un espaliers, un meuble en bois accroché aux murs qui, pour des raisons de style, ne peut être daté avant le milieu du XVe.

Cette scène vivante représente un fête, dans les rues de Florence.
Sur la gauche, le regardeur reconnait la Loggia del  Bigallo et la forme orthogonale caractéristique du  Baptistère à arrière-plan.

L’attention portée par Lo Scheggia aux détails architecturaux offre une documentation précieuse sur le paysage urbain médiéval de Florence.
La loggia en marbre est reliée par une tente à un bâtiment soutenu par des poutres en bois appelées « sporti », courantes dans la Florence médiévale.
Sous le rideau, en présence de quelques musiciens qui soufflent dans des trompettes, se déroule une danse typiquement florentine dans laquelle les couples se déplacent lentement en se tenant par les doigts.

Les personnages portent des vêtements luxueux, ornés de perles et tissés d’or et d’argent, selon la mode de cette moitié de siècle.

À gauche, deux serviteurs sont occupés à transporter une bassine et un présentoir à l’intérieur d’une habitation : il s’agit probablement du cortège qui accompagnait l’épouse dans la nouvelle demeure de son mari, avec une riche série de dons.

Le cortège magnifique s’avance vers un  groupe d’hommes qui les accueille des deux mains.

Lo Scheggia humanise ses personnages, il nous les rend accessibles.

Lo Scheggia met en évidence le rôle de la couleur dans la construction de l’espace pictural. Le peintre  juxtapose sereinement les plans colorés.
Le style de Lo Scheggia réalise une synthèse perspective de forme-couleur.
C’est en effet l’alliance de la couleur avec la perspective mathématique qui définit son mouvement pictural.

Lo Scheggia est spécialisé dans la production de meubles et de commodes de luxe pour les familles florentines nobles, toujours en équilibre entre les nouveautés de la perspective de la Renaissance et les élégances extrêmes du gothique.

 

 

Analyse 

Peinture profane 

Outre les diverses représentations religieuses, les artistes italiens peignirent une vaste gamme d’œuvres profanes de commande, destinées aussi bien aux églises qu’aux édifices publics et aux résidences privées.
Si certaines commémoraient des victoires militaires, comme le cycle consacré par Paolo Uccello à la Bataille de San Romano d’autres illustraient des mythes antiques appréciés des érudits ou captaient des scènes de la vie quotidienne.
Parmi les objets utilitaires souvent décorés de peintures profanes figure le Cassone, coffre en bois renfermant le trousseau d’une jeune mariée.
Ces pièces étaient souvent ornées de scènes élaborées, les plus appréciées étant les récits de la Rome antique qui procuraient aux époux des modèles de bonne conduite.

Les italiens cultivés étaient férus de littérature antique : Tite-Live, pour l’histoire de Rome, ou Ovide, dont les récits de rencontres entre Dieux et mortels inspirèrent les artistes de la Renaissance.

La peinture de lumière est avant tout une affirmation des caractéristiques formelles de lumière et surtout de couleur, des peintres florentins du milieu du Quattrocento.
Cette « peinture de lumière » au sein de cadre florentin est une tendance des années 1430, 1440, qui élargira son spectre jusqu’à Masaccio.
Ce n’est pas la perspective ou la couleur qui résument l’art de Lo Scheggia, mais la lumière elle-même. La lumière picturale caractérise ce tableau.

Ce tableau est une peinture narrative.

La « narration ornée » est fondatrice d’une culture mise à l’honneur par le Maître du cassone Adimari.

Les éléments animés de ce panneau sont les personnages.

Les éléments inanimés qui composent l’environnement picturale
se présentent sous divers aspects allant des édifices architecturaux en passant  par des instruments de musique, des plats , des tentures.

Les éléments tridimensionnels et les éléments bidimensionnels occupent des portions approximativement égales du champ de l’image.

Les éléments tridimensionnels comprennent des édifices architecturaux.
Les éléments bidimensionnels leur principal représentant est le fond monochrome auquel se joint le sol.

Au premier plan, le tableau présente deux architectures qui occupent des portions du champ de l’image approximativement égales et situées de manière symétrique de part et d’autre de l’axe médian vertical, à gauche la loggia prolongée par le banc des musiciens, à droite une construction fortifiée.

Ces éléments apparaissent à une échelle similaire.
Les personnages contribuent à déterminer l’échelle.
La taille du corps humain est le seul indice de grandeur d’échelle dans les images du XIIIe.

Les architectures tendent à occuper la plus grande partie de la hauteur de l’image.
Les éléments tridimensionnels de l’environnement pictural constituent de petits volumes, ramassés et d’extension limitée, cela est du à leur taille et à leur forme.
Les bâtiments  jusqu’à la fin du XIIIe,  sont présentés vus de l’extérieur, de façon à insister sur l’image du corps solide. Ce qui prime c’est la masse du bâtiment et non pas l’idée d’un contenant.

Ainsi la loggia à gauche de la composition introduit dans l’environnement pictural le  banc des musiciens. Le banc des musiciens est dans le prolongement de la loggia.

Cette architecture a pour fonction de localiser l’histoire. 

La scène se passe en extérieur dans une rue.
La distribution des éléments tridimensionnels et celle des personnages se font mutuellement écho. 

Les petits groupes de personnages sont associés à un lieu qui leur est propre.
Ces groupes forment des unités qui interagissent avec d’autres personnages ou groupe,  à gauche les mariés, au centre les convives, et à droite les organisateurs.
Dans ce tableau, les personnages sont au premier plan et plastiquement encadrés par le lieu.
Tous les personnages, hormis les musiciens, sont en tenues de cérémonie.

Le lieu est utile pour signaler l’importance narrative et sociale.

Le lieu exprime également le statut des personnages en les situant dans un système de relations sociales.
Ici les personnages se déplacent, le départ et l’arrivée sont marqués par le sens de la marche. Le rôle du lieu est moins de situer l’action de déplacement que de l’exprimer.
Les lieux existent en fonction des personnages.

Les bâtiments bordent la rue jusqu’au rempart. Une porte dans l’axe du tableau au milieu du rempart permet l’accès à la rue.
Le regardeur voit au-delà des remparts les collines sur lesquelles s’élèvent des châteaux et des constructions.

Un tapis de sol doré a été déroulé au milieu de la rue sur un  pavement de pierres., sous la tente. Le tapis est parallèle au bord de l’image . Le pavement  s’étend sur toute la largeur de l’image.  Une lice au bord inférieur du tableau est recouverte de velours noir d’apparat. Sa visibilité est assurée par les contrastes sombre-clair.

Le fond, apparait situé  derrière les autres éléments puisqu’il constitue la dernière série de strates qui, se situant successivement les unes derrière les autres perpendiculairement à la surface de l’image, contribue à donner une impression de profondeur : il prend alors le nom de fond au sens où il ferme cette profondeur.

La peinture contribue à implanter l’image dans le monde du réel.

Le lieu exprime le pouvoir et la richesse matérielle.

 

 

Conclusion 

Le Musée Cluny à Paris possède une collection importante de panneaux peints pour orner les deux faces des coffres de mariage. 

Faits en Italie à l’aube de la Renaissance, ils sont arrivés en France sous le second empire avec la collection Campana.

 

 

Sources :
Biographie de Wikipédia
Rowley Neville : Pittura di luce -2007
Anna Little : Du Lieu à l‘espace -transformation de l’environnement pictural en Italie centrale (XIIIe- XVe s.) -2010