David élevé et couronné – Milieu du Xe – Psautier de Paris 

Psautier de Paris 

 

David élevé et couronné 

Milieu du Xe

Peinture et or sur parchemin
Dim 37 x 26,5 cm

Conservé à a Bibliothèque nationale de Paris 

 

L’enluminure 

L’enluminure apparaissant ici appartient aux 14 illustrations pleine page que compte le magnifique Psautier de Paris
Elle représente le couronnement de David hissé sur son bouclier, une tradition empruntée à l’armée romaine.
L’artiste s’est inspiré de modèles classiques pour réaliser ses enluminures, qui mêlent références ou symboles romains et coutumes impériales contemporaines.

 

Manuscrits enluminés 

Portés par les patriarches lors des processions de Pâques, lus par les moines dans les grottes isolées et tenus par les empereurs pendant le déroulement des cérémonies importantes, les livres sacrés aux enluminures souvent éblouissantes étaient au cœur de la croyance byzantine et de ses rituels.

Si peu de manuscrits semblent avoir été réalisés au début de l’ère byzantine – entre le VIe et le VIIe- le IXe,  on assiste au contraire  à une profusion d’ouvrages peints, certainement en raison de la fin de l’iconoclasme.

Des œuvres majeures furent réalisées à Constantinople, dont le Psautier Chludov et une édition des Homélies de Grégoire de Nazianze, ouvrage probablement rédigé par l’empereur Basile 1er et sa famille. Celle-ci est constituée d’illustrations pleine page venant enrichir les sermons de l’archevêque Grégoire, célèbre père de l’Église du IVe et archevêque de Constantinople. Le livre contient également une enluminure représentant l’empereur Basile entouré de sa femme et de ses fils ; ce type de portrait était fréquent dans les manuscrits richement enluminés qui appartenaient jadis aux souverains byzantins.
Le Psautier Chludov est constitué quant à lui d’illustrations marginales dont les miniatures représentant des scènes tirées des psaumes : évènements prédits dans le Nouveau Testament ou scènes pouvant faire référence à la situation politique contemporaine. Cet ouvrage, ou un autre très semblable à celui-ci, fut copié au XIXe  et est connu sous le nom de Psautier de Théodore. Il fut rédigé au monastère Saint-Jean-de Stoudios de Constantinople, dont le scriptorium était renommé pour ses manuscrits.

Au Xe un psautier d’un genre différent fut rédigé, probablement destiné à Romain II qui régna de 959 à 963.  Plutôt que des illustrations marginales, celui-ci présentent des images pleine page dépeignant des scènes importantes de la vie de David, prophète et roi.

On admet généralement que ces représentations ont été effectuées à partir d’exemples de modèles plus anciens et que leur esthétique et leur iconographie témoignent de l’influence de l’Antiquité classique.

Présentant un style et un format innovant, un magnifique manuscrit datant du XIIe illustre les homélies rédigées par un moine du nom de Jacques Kokkinobaphos.
Les sermons, dont le sujet est la Vierge Marie, montrent une série complexe de scènes représentant la vie apocryphe de celle-ci.

Beaucoup de manuscrits précieux disparurent au cours des guerres de Religion.

Le psautier de paris est un fameux manuscrit byzantin conservé à la Bibliothèque nationale de Paris.

Son texte, illustré de quelques miniatures d’un goût parfait, est écrit sur un très beau parchemin et date du Xe, au temps des empereurs macédoniens, et plus particulièrement de Constantin VII Porphyrogénète (905-959) qui avait un goût prononcé pour la culture grecque.

À ce moment on a ajouté quatorze miniatures illustrant la vie de David et les Cantiques bibliques, sur un parchemin vulgaire, de dimension un peu différente de celle du texte, et d’une exécution médiocre, mais qui sont des copies d’originaux d’une  grande valeur.
Le professeur Byvanek montre que les miniatures à  pleine page, sortent de tableaux exécutés par des artistes du Xe  qui s’inspirent  d’originaux  datant du temps des empereurs Théodose 1er et Théodose II, de la seconde moitié du IVe au milieu du Ve qui correspond à la première période byzantine, d’un classicisme raffiné, où triomphe le goût pour l’architecture classique, pour  les compositions mesurées et pour l’imitation fidèle de la nature. Les rochers  aux formes naturelles du Sinaï et de la montagne d’Ézéchiel ne se trouveront plus après la première moitié du Ve  remarque le professeur Byvanek .

Les peintures du Psautier se présentent sous la forme de tableaux  pleine page, dans des cadres ornés avec une grande variété, avec la plupart du temps des fonds de paysages et d’édifices d’aspect antique, sur lesquels se détachent des personnages environnés de figures allégoriques de la plus pure tradition classique.

Les huit premières ont trait à l’histoire de David : David jouant de la harpe au milieu de son troupeau, David tuant un lion, David sacré par Samuel, David et Goliath, le Triomphe de David, David couronné et élevé sur le pavois, David entre la Sagesse et la Prophétie et la Pénitence de David.
Suit l’illustration de six odes, cantiques d’action de grâce pour les bienfaits accordés par Jéhovah à son peuple.

Sauf dans le premier tableau, les figures sont nimbées.

Dans deux manuscrits byzantins, celui des Homélies de Grégoire de Nazianze, peint à Constantinople entre 880 et 886 et l’autre, la Bible de Léon du nom de son donateur et daté de la première moitié du Xe.
Dans ces deux manuscrits les thèmes bibliques sont souvent traités avec les mêmes détails que sur le Psautier.
La bible de Léon est illustrée de tableaux qui rappellent ceux du Psautier, par leur forme et leur iconographie. La ressemblance des peintures des deux manuscrits est telle, dans les sujets qui leur sont communs, que l’on suppose que le peintre de la Bible a simplement copié les peintres du Psautier en les modifiant.
Ce n’est pas le cas, H. Buchthal le démontre. Les peintures de la Bible sont très inférieures en valeur artistique à celles du Psautier.
Les deux œuvres sont indépendantes et s’inspirent d’un modèle commun.

L’analyse des éléments de chacune des peintures aboutit à la conclusion, que les œuvres qu’il est possible de leur comparer n’en sont ni des modèles si elles sont plus anciennes, ni des copies si elles sont postérieures. 

L’analyse iconographique permet de constater l’originalité du Psautier.

C’est ainsi que l’un des Psautiers Barberini reproduit le premier tableau (David berger) d’une manière très inférieure à celle du Psautier de Paris.

L’interprétation du Psautier de Paris est plus gracieuse.
Cette adaptation à un cadre vertical, formant une narration continue, c’est le procédé employé dans le Psautier.

Un des exemples les plus nets est celui du Sacre de David.

Au XIe l’ordonnance est la même sur le livre des Rois, mais les frères de David, au nombre de sept forment deux groupes superposés, les autres personnages se détachent sur un fond d’architecture, et derrière David, apparaît la figure allégorique de Praotes (la Bonté).

Dans le Psautier  la composition au lieu de se développer en longueur, est ramassée dans un cadre vertical, la frise est devenue un tableau de chevalet.
Il en résulte que les frères de David, placés à gauche, doivent être montrés en perspective et que, pour remplir le haut du cadre, les édifices de fond s’élèvent et prennent plus d’importance.

Sans que les personnages aient absolument le même type et fassent exactement les mêmes gestes, les deux miniatures ont une composition identique, mais quelques interprétations incorrectes des peintures du Psautier montrent qu’elles sont plus loin du prototype que la Bible du Vatican.

L’illustration de l’écriture Sainte, propre au livre en parchemin a été adoptée dans l’antiquité classique pour les livres. L’illustration continue est liée étroitement au texte qu’elle suit pas à pas. Ses figures n’ont aucune individualité et n’ont par elles mêmes qu’un sens incomplet; elles répondent moins à un souci artistique qu’à une préoccupation d’exactitude. 

Le cadre au contraire est une œuvre isolée faite pour le plaisir des yeux à la recherche de la beauté. Les thèmes qu’il contient expriment moins les détails matériels du texte que son esprit.
Il présente une leçon ; il a avant tout une valeur spirituelle et artistique.

Parmi les manuscrits apparentés au Psautier de Paris, le Grégoire de Nazianze a adapté les thèmes bibliques au texte des sermons , au moyen d’un style continu, en réservant cependant la page entière à certaines figures.
C’est le seul manuscrit de ce groupe qui, soit bien daté entre 880 et 886.

Le retour à la miniature pleine page culmine dans le Psautier de Paris. 

Les compositions du Psautier de Paris ne sont pas la répétition de formes anciennes, mais des créations, certainement postérieures aux temps iconoclastes.

Elles attestent qu’un mouvement de rénovation artistique s’est dessiné à Byzance dès la fin du IXe.

Les peintres du Psautier de Paris puisent aux mêmes sources  que ceux de la Bible de Léon, du Grégoire de Nazianze, du Cosmas du Vatican et du Rouleau de Josué.
Tous les peintres ce ces manuscrits se sont servis d’un modèle commun, d’un cycle primitif de l’Ancien Testament, dont les manuscrits de l’Octateuque,  bien que les plus anciens dates du XIe.
Ainsi l’illustration de l’histoire de David dans le Psautier de Paris dérive du même archétype que les Octateuques  et ce modèle présentait une illustration continue, dont on retrouve les traces dans les manuscrits postérieurs et dans les  Octateuques eux-mêmes.
Les Octateuques sont les huit premiers  livres de l’Ancien Testament dans la tradition chrétienne.

L’iconographie ne peut servir à dater les peintures du Psautier de Paris, qui reproduit  des images d’époques très diverses.
C’est seulement par l’étude de leur style et par comparaisons avec d’autres manuscrits qu’on peut assigner une place à ces peintres dans les développements de l’art byzantin.

Dans le Psautier de Paris les corps apparaissent dans le véritable espace à trois dimensions.
La stylisation de la lumière et de l’ombre donne aux figures un volume et une plasticité plus marqués.
Les figures sont simples, les formes monumentales, leur volume plus visible « de véritables corps palpitent sous les draperies ».
Les détails du dessin sont subordonnés au mouvement de la figure.
Ce traitement des corps et des figures est bien un retour aux modèles de l’art classique, quoiqu’il n’ apparaisse pas dans tous les tableaux du Psautier avec la même clarté.

Si le cycle iconographique des peintures révèle des modèles de plusieurs époques, chacune d’elle n’en a pas moins une unité parfaite, tant au point de vue de la composition que du style.

L’enseignement qui ressort de ces miniatures, c’est qu’elles marquent un renouvellement de l’art byzantin, grâce à un nouveau contact avec l’art hellénistique.

Ce retour à l’antiquité est une conséquence logique du développement de l’art byzantin pendant le siècle qui sépare le Grégoire de Nazianze du Psautier de Paris.
Ainsi c’est dans la seconde moitié du Xe qu’il faut placer l’exécution des peintures du Psautier de Paris et c’est ce qui explique les fautes de dessin aussi nombreuses dans ces peintures que dans le Rouleau de Josué.

Tout en reconnaissant l’originalité et la nouveauté de ces peintures, tout  en admettant qu’elles marquent une renaissance de la valeur plastique des figures et du rythme de l’art classique, une émancipation des chaînes de la composition narrative, remplacée par la peinture à pleine page d’une scène isolée et condensée, les peintures du Psautier de Paris « n’apparaissent pas comme des œuvres extraordinaires ».

Le Psautier de Paris a été peint à Constantinople.

Le caractère monarchique de l’Illustration, véritable expression concrète de la doctrine religieuse qui était le fondement même du pouvoir impérial, le rite de l’élévation sur le pavois, l’Exaltation de David costumé  et jusqu’au tableau de Pénitence, tout nous invite à regarder le Psautier comme sorti du palais impérial.

Le Rouleau de Josué montre d’une manière évidente ses rapports stylistiques avec le Psautier de Paris

 

 

Conclusion 

Le psautier est un des livres de l’Ancien Testament les plus lus.

Le magnifique Psautier de Paris a déjà fait l’objet d’un nombre considérable d’études et de descriptions, dues aux historiens les plus connus de l’art byzantin.
Cependant  les problèmes que soulève son illustration sont tels qu’on ne peut les considérer comme définitivement résolus.

Le Psautier de Paris est une des plus belles expressions du développement artistique auquel on a attribué le nom de Renaissance Macédonienne.

 

 

 

Sources :
Article de Marcel Aubert -1955 : L’illustration du Psautier de Paris
Article de Louis Bréhier1939 : Le Psautier de Paris et la Renaissance macédonienne.