Année : 2018
Moonfleet- lumières d’étoiles – l’étoile du berger, la lune
Réunion de famille -Frédéric Bazille
Frédéric Bazille (1841-1870)
Réunion de famille dit aussi Portraits de famille
1867 ; retouché en 1869
Huile sur toile
Dim 152 x 227 cm
Conservé à Orsay
Frédéric Bazille
Bazille est originaire de Montpellier. À 21 ans en 1862, il monte à Paris. Il se consacre à la peinture. Il devient l’élève de Charles Glayre, comme Monet.
Il se lie avec Monet, Renoir, Sisley et Pissarro.
Ensemble ils luttent contre les dictats de l’académisme.
Dès le début de sa carrière de peintre, Bazille est lié au mouvement Impressionniste.
Bazille est mort en soldat, à 29 ans, pendant la guerre franco-prussienne de 1870.
Introduction
Zola : « Réunion de famille témoigne d’un amour vif de la vérité. Les personnages sont groupés sur une terrasse, dans l’ombre d’un arbre. Chaque physionomie est étudiée avec un soin extrême, chaque figure a l’allure qui lui est propre. »
Description
Cette grande toile est un portrait de groupe en plein air où Bazille s’est représenté à l’extrême gauche du tableau, dans l’ombre d’un châtaignier, sur la terrasse de la maison familiale dans le midi.
Il y a onze personnages, 6 femmes et 5 hommes.
C’est l’été, toute la famille est rassemblée sous le grand arbre et pose pour le peintre.
Le bouquet posé au sol, au premier plan du tableau, indique que la famille revient du jardin où elle a cueilli des fleurs. Le canotier et l’ombrelle symbolisent la promenade.
Composition
C’est un tableau très construit.
Trois diagonales parallèles rythment le tableau et le décomposent en trois groupes.
La composition est coupée par les verticales des personnages debout et par le tronc du châtaignier.
-1ergroupe à gauche du tableau :
A l’extrême gauche Bazille se tient debout caché derrière son oncle
Assis sur le banc le père et la mère de Bazille, la mère regarde le spectateur, le père regarde au loin.
-2èmegroupe à l’aplomb de l’arbre :
Un jeune couple se tient debout contre le tronc du châtaignier et regarde dans la même direction que le père. Devant eux, assises autour d’une table, la tante du peintre (devant un ouvrage posé sur la table) et sa jeune cousine. La jeune-femme est assise de dos, elle se retourne pour regarder le spectateur, l’intensité de son regard, lui donne une grande présence.
-3èmegroupe à droite du tableau, le long du muret de la terrasse :
Trois personnes regardent le spectateur : un couple : le frère de Bazille est debout penché vers sa femme assise devant lui, il a un pied posé sur sa chaise. A ses cotés assise sur le muret, Camille, la plus jeune cousine du peintre.
Dans ce tableau la lumière a une présence à part entière au même titre que les figures.
Le premier plan est dans l’ombre et l’arrière-plan est dans la lumière.
Il y a deux éclairages dans ce tableau, l’ombre des arbres et la lumière de l’été.
Les personnages sont représentés dans l’ombre de deux arbres.
L’arbre à gauche, étend son feuillage sur la terrasse et l’arbre à droite (hors-cadre) projette son ombre sur la toile.
Les rayons du soleil s’infiltrant entre les deux arbres, dessinent une flaque de lumière au sol.
On lit la toile de l’ombre à la lumière, des valeurs sombres vers les valeurs claires.
Cette lumière tamisée et le vert foncé des feuilles de châtaignier font ressortir les couleurs. Bazille sait rendre les variations colorées des étoffes, et faire ressortir les contrastes audacieux entre le vert, le bleu et le blanc. Le ciel et les robes tranchent fortement avec le feuillage et illuminent l’ensemble de la toile.
Le paysage comme les personnages est statique et sculpté par l’ombre et la lumière.
Analyse
Ce portrait de groupe représente la famille de Bazille. Une famille protestante du Languedoc. Une famille bourgeoise représentée dans son lieu de villégiature.
Le père assis, jambes croisées, ne regarde pas vers le spectateur, il incarne l’autorité, il est le chef de famille et Bazille le représente sans la moindre ambiguïté.
Les hommes tous en gilet et redingote paraissent engoncés dans leurs tenues et contrastent avec les figures féminines vêtues de robes légères de couleurs claires qui apportent de la fantaisie.
Personne ne sourit dans ce portrait, les personnages sont figés et la rigidité qu’ils dégagent traduit la distance qui les sépare.
Si on compare cette toile aux portraits académiques de la même époque, ce portrait apparait très novateur par la place que prend la lumière.
Monet et Bazille étaient amis, ils peignaient ensemble. Monet a représenté Bazille dans deux de ses toiles : Le déjeuner sur l’herbe et Femmes au jardin
Bazille a acheté à Monet sa toile Femmes au jardin
Le thème de la terrasse familiale a été traité par Monet et Bazille au cours du même été.
Le tableau de Monet La terrasse à saint Adresse est conservé au Métropolitain Muséum, of Art de New York.
Dans Réunion de famille Bazille s’inspire de Monet en représentant un groupe de figures en plein air comme dans le Déjeuner sur l’herbe et Femmes au jardin
Bazille emprunte à Monet les robes blanches et légères de Femmes au jardin pour éclairer sa composition.
Bazille fixe la lumière du sud comme sur une photographie.
La démarche est la même que Monet mais, le rendu est différent.
Monet peint à Paris avec une lumière constamment changeante.
Chez Monet les variations de la lumière dissolvent les formes.
Dans ce tableau, Bazille éternise un après-midi d’été.
Chez Bazille le paysage est un cadre, chez Monet il est le sujet.
Conclusion
Le portrait de famille est en vogue au XIXe.
Ce sont des portraits académiques statufiant une famille pour l’éternité.
Un jeune artiste devait accepter des compromis esthétiques, tenir compte des limites fixées par le jury constitué de peintres réputés et souvent conservateurs.
Focillon écrit à propos de Bazille dans son ouvrage :
« la peinture au XIXe -du réalisme à nos jours ».
« Il appartient non comme un débutant doué mais comme un initiateur et comme un maître à l’histoire de cette renaissance de la peinture française qui rétablit l’accord entre l’homme la nature et la lumière…il porte dans son âme et dans son art, mêlés à son délicieux charme et à son audace de peintre, une fierté de jeunesse retenue qu’il tient peut-être de ses origines protestantes ».
Le tableau -Bazille -Portraits de famille 1867 et 69
Dimanche -Bazille
Ouvrage -Bazille
Premier plan -Bazille
Arrière-plan -Bazille
Femmes au jardin – Claude Monet 2
Claude Monet (1840-1926)
Femmes au jardin
Vers 1866
Huile sur toile
Dim. 255 x 205 cm
Conservé à Orsay
Introduction
Cette toile montre pour la première fois la lumière naturelle et changeante, chère à Monet.
Monet veut peindre directement sur le motif pour capter les effets de la lumière.
Femmes au jardin a été réalisé dans le jardin du peintre à Sèvres.
Pour ce tableau, Monet a creusé une tranchée et installé une poulie pour atteindre le haut de sa toile.
Description
« Tu seras les trois femmes qui seront sur la gauche de la toile » dit Monet à son modèle, Camille Doncieux.
Camille s’exécute. Chaque jour, elle change de robe.
–Assise au centre, elle porte une robe et une veste blanches ornées de broderies en arabesques noires. Son regard se penche vers le bouquet de fleurs posé devant elle, sur sa robe. On remarque les volants du jupon blanc qui dépassent de la robe, dans l’allée. Elle porte un petit chapeau à galette qui lui enserre les cheveux. Son visage aux paupières baissées, protégé par l’ombrelle s’éclaire d’une lumière chaude.
–Debout, de profil et à gauche au deuxième plan, Camille porte une crinoline blanche rayée de vert. Elle est coiffée d’un petit chapeau posé sur son chignon et noué par un long ruban blanc qui descend jusqu’au bas de son dos.
–De face et, un pas en arrière de la figure de profil, Camille porte une jupe droite de couleur beige. Elle a le visage enfoui dans un bouquet de fleurs multicolores. Ses grands yeux bruns regardent droit devant elle.
Au fond de l’allée rosâtre, une quatrième femme aux cheveux roux cueille une rose. Elle nous tourne le dos et porte une robe en mousseline blanche à pois noirs qui capte la lumière et illumine le tableau.
Femmes au jardin est une œuvre représentative de la société du XIXe.
On a une étude précise des robes portées par les femmes bourgeoises.
Composition
Monet travaille l’ombre et la lumière.
Les visages sont réduits à une esquisse.
Les personnages ont pour fonction d’animer la composition et les tissus de leurs robes renvoient la lumière et dessinent les ombres.
D’un point de vue stylistique, Monet laisse les touches de peinture apparentes.
Avec ce tableau l’ambition de Monet est déjà impressionniste.
Il utilise la technique de juxtaposition des couleurs complémentaires pour accentuer la luminosité. Il peint sur le motif pour préserver l’impression initiale.
Il n’idéalise pas la nature et transmet une perception naturelle saisie à un moment précis.
Les touches sont visibles, certaines formes restent ébauchées, l’essentiel étant que l’impression saisie sur le motif soit transposée sur la toile.
L’artifice de composition consiste à représenter les personnages habillés de vêtements clairs et une allée de sable clair sur un fond de verdure.
Le ciel entrevu entre les frondaisons des arbres en haut à droite du tableau est nuageux. Cependant l’ombre sur l’allée nous indique que la lumière vient de la droite.
Les jeux d’ombre et de lumière font partie intégrante de la composition.
L’arbre est le point central de la composition et constitue une repère vertical naturel.
L’oblique qui s’enfonce dans le jardin, donnant à la représentation sa profondeur, est matérialisée par l’allée de sable.
Analyse
Monet dit « je n’ai pas d’atelier » -il désigne les collines : « le voilà mon atelier ! »
Cette toile est originale par le fait qu’elle est peinte sur nature.
Monet a saisi un instant. Il le traduit avec la figure de l’arrière-plan qu’il représente dans un mouvement tournant : la mousseline de la robe vole et accompagne le geste du modèle qui cueille une fleur
Ce n’est pas le portrait qui intéresse le peintre, ce n’est pas son visage, ce n’est pas le modèle, c’est, l’insertion de la figure dans la nature.
Les bouquets de fleurs sont composés et représentés avec soin, ils rappellent que Monet est un grand peintre de nature-morte.
Monet reprend dans ce tableau les robes qu’il avait utilisées dans Le déjeuner sur l’herbe(1865). Ce qui traduit son goût pour les étoffes et plus généralement son goût pour les belles choses. Comme les fleurs qui sont partout.
Ce tableau est une sorte de manifeste.
Conclusion
L’objectif poursuivi par les impressionnistes échappait aux observateurs.
Émile Zola représente l’exception lorsqu’il écrit à propos de Femmes au jardin
« Le soleil tombait droit sur les jupes d’une blancheur éclatante ; l’ombre tiède d’un arbre découpait sur l’allée, sur les robes ensoleillées, une grande nappe grise. Rien de plus étrange comme effet. Il faut aimer singulièrement son temps pour oser un pareil tour de force, des étoffes coupées en deux par l’ombre et le soleil. »
Cette composition ambitieuse par sa taille et son style se démarque trop de l’académisme qui impose une touche lissée pour avoir les faveurs du jury.
La toile fut refusée au Salon de 1867.