Vierge à l’enfant entourée de Justinien et de Constantin – Xe Mosaïque byzantine

Mosaïques du milieu de la période byzantine

 

 Vierge à l’enfant entourée de Justinien et de Constantin

 Xe

Longueur : environ 430 cm

In situ, Basilique Sainte Sophie, au-dessus de la porte d’entrée sud-ouest (espace réservé à l’empereur sur le plan) Istanbul.

 

La mosaïque

En 330 Constantin -représenté à droite de la mosaïque, fonde Constantinople et fait ériger une première basilique Sainte Sophie. En 537, l’empereur byzantin Justinien -représenté à gauche de la mosaïque, fait édifier une nouvelle basilique à la place de l’ancienne.

Sur cette mosaïque du Xe les deux empereurs offrent leur création à l’Enfant Jésus.

 

Composition

La Vierge et l’Enfant sont immobiles, impassibles et hiératiques.
Assise sur un trône, la Vierge tient l’Enfant sur ses genoux ; au-dessus de sa tête, son nom abrégé est inscrit en lettres grecques dans deux médaillons.
À sa gauche se tient l’empereur Constantin lui présentant la ville dont il est le fondateur, tandis qu’à sa droite, l’empereur Justinien lui offre l’église qu’il fit ériger.

Ces deux empereurs du IVe et VIe arborent les tenues anachroniques de souverains du Xe, date à laquelle la mosaïque fut réalisée.

Les personnages représentés sont à la fois vigoureux et solides et d’une grande élégance, due à leurs proportions harmonieuses et à la grâce de leurs attitudes. Les visages allongés à l’ovale parfait, au front haut et aux yeux agrandis se distinguent aussi par un nez mince et une petite bouche, ce qui leur confère noblesse et distinction.

Cependant,  les personnages n’expriment aucune émotion.

Les bleus et les verts des vêtements projetés sur le fond d’or prédominent.

Souplesse du dessin, vivacité et harmonie du coloris, raffinement des attitudes distinguent cette mosaïque.

Le fond doré uni donne à la mosaïque un atmosphère éthérée irréelle tout en concentrant l’attention du regardeur sur le sujet lui-même.

Immobiles et sereins, irradiés de lumière, les personnages sacrés annoncent aux fidèles les joies de l’au-delà.

Le rôle de la mosaïque est d’évoquer par l’image une vérité religieuse intemporelle.

Cette mosaïque comme toutes les mosaïques de Sainte Sophie, s’adapte aux formes architecturales qu’elle décore et contribue à en souligner le volume.


Technique
 :

La mosaïque très coûteuse était réservée aux fondations impériales.

La mosaïque consiste à appliquer des milliers de petits morceaux de matériaux divers préalablement découpés sur une surface de plâtre. Ces petits éléments sont appelés tesselles.

L’image à réaliser est d’abord dessinée sur le mur.

Les tesselles sont en pierre, marbre, brique, verre, émaux, or et pierres précieuses.

 

Histoire

La civilisation byzantine

La civilisation byzantine, dont les vestiges survivent encore aujourd’hui dans les croyances et les rituels de l’Église orthodoxe, représente le lien entre le classicisme des civilisations grecque et romaine et la redécouverte humaniste de ces cultures à l’origine de la Renaissance.

Parallèlement, cette civilisation eut des interactions permanentes avec la culture de l’Europe médiévale contemporaine.

Prolongement de l’Empire romain, l’Empire byzantin naquit en 324 lorsque l’empereur romain Constantin le Grand (règne : 324-337) décida de donner une nouvelle orientation à l’Empire : il en déplaça le centre vers l’est et fonda une capitale au point de rencontre du détroit du Bosphore et de la mer de Marmara, qu’il nomma Constantinople.

Fondée en 330, la ville aux innombrables statues païennes, avait tous les attributs d’une métropole de l’Antiquité tardive. Fondée sur le site antique de Byzantion, la nouvelle capitale a un emplacement économique (située sur la route du commerce Orient-Occident et une position stratégique (au croisement des routes de la mer noire à la méditerranée et de l’Asie à l’Europe, proche du Danube et de la frontière perse).

Constantin, qui fut le premier empereur romain à se convertir au christianisme (en 311) constitue le début de l’empire chrétien. Il fit de Constantinople un centre du christianisme dynamique et sophistiqué, aux églises et aux monastères d’une beauté stupéfiante.

Le christianisme devient la religion officielle de l’empire, cette décision est plus politique que religieuse.

Constantinople demeura la capitale de l’Empire romain d’Orient pendant plus d’un millier d’années.

Jusqu’en 476, date de la chute de Rome aux mains des tribus germaniques, la moitié Occidentale de l’Empire possédait sa propre capitale.
Pour les historiens, l’an 476 marque la fin de l’Empire romain mais, pour les byzantins, l’Empire vécut jusqu’en 1453, au moment de la conquête de Constantinople par les Ottomans.

Au cours des IVe et Ve et jusqu’au siècle suivant, les parties orientales et occidentales de l’Empire étaient étroitement liées. Certains des bâtiments les plus raffinés de Constantinople furent érigés sous le règne de l’empereur Justinien 1er (règne : 527-565), comme la grande basilique Sainte Sophie ; il acheva également l’ornementation de plusieurs églises de Ravenne, au nord-est de l’Italie.

L’influence politique byzantine sur l’Occident déclina à partir du VIIIe, même si l’art oriental eut un impact important sur le règne de l’empereur Franc Charlemagne à la fin de ce siècle et au siècle suivant, il s’agit de la Renaissance carolingienne.

Après la restauration du culte des images dans la second moitié du IXe, la production d’œuvres visuelles, icônes sophistiquées, émaux délicats, œuvres de ferronnerie recherchées, ouvrages enluminés, ivoires sculptés et peintures ou mosaïques religieuses, sortirent de l’imagination fertile des artistes de cette époque.

L’ingéniosité et la finesse artistiques perdurèrent jusqu’au XIIe, seul le pillage de Constantinople par les soldats de la quatrième croisade, en 1204 y mit un terme.

Malgré la situation politique de plus en plus périlleuse, les centres du pouvoir aristocratique byzantin prospérèrent, comme Thessalonique et Mistra, en Grèce, et l’influence des artistes byzantins se répandit à la fois dans le monde musulman oriental et dans le mondes chrétien occidental.

Après mille ans de magnificence et de création artistique ininterrompue, Byzance cessa d’exister et ne survécut qu’à travers l’orthodoxie et l’art post-byzantin pratiqué dans les pays orthodoxes jusqu’à l’époque moderne.


I-  La basilique Sainte Sophie : architecture

La grande église Sainte Sophie de Constantinople, centre du monde byzantin pendant près d’un millier d’années, témoigne d’une inventivité audacieuse par son architecture.

Les premières origines de la basilique remontent au IVe, endommagée en 350 par les Macédoniens, incendiée et détériorée par suite de la condamnation de saint Jean Chrysostome, elle est reconstruite en 415 et à nouveau incendiée en 532, l’actuelle basilique fut érigée en cinq ans par l’empereur Justinien 1er -de 532 à 537.

L’église est dédiée à la « Sainte Sagesse ».
C’est-à-dire la sagesse divine qui inspire l’empereur.

À la suite de deux tremblements de terre en 553 et 557, la coupole s’effondra en 558. L’empereur reconstruit l’œuvre, la nouvelle coupole décorée de splendides mosaïques fut achevée en 562.

Le plan de la basilique est rectangulaire, ses dimensions : 75 m de long sur 70 m de large, la coupole : 31 m de diamètre à 55 m du sol. Une grande nef au centre et deux ailes latérales plus petites, au fond de la nef se trouve le chœur, le centre de cette nef est surmonté de la coupole. La coupole est baignée par la lumière de 40 fenêtres percées dans la partie supérieure de l’édifice.

Le dôme massif de Sainte Sophie, d’un diamètre de 31 m est composé d’une nef rectangulaire flanquée de bas-côtés.

Cette structure est l’œuvre d’Anthémius de Tralles, mathématicien expert en géométrie, et d’Isidore de Millet, professeur de physique.

Quatre piliers monumentaux, formant les coins d’un carré de 31 m de côté, soutiennent les pendentifs, des structures triangulaires supportant elles-mêmes le dôme et ses 40 nervures. Le poids de la coupole est réparti sur des coupoles en demi-sphère aux extrémités est et ouest. Reposant sur des piliers, ils sont eux-mêmes soutenus par des voûtes d’abside à chaque coin. Sur les côtés nord et sud, la coupole est contrebalancée par 2 grands arcs reposant sur des piliers enfermant un tympan percé de fenêtres reposant sur des colonnes.

La finesse des colonnades, l’abondance de la lumière -dont les rayons rebondissent à l’infini sur les mosaïques, et la richesse des mosaïques à fond doré éblouissent le regardeur.

Plan de Sainte Sophie à Istanbul :

 

 

II-  La basilique Sainte Sophie a continué sa vie en témoignant de l’évolution stylistique de l’art byzantin et en s’adaptant aux religions.

 A/ l’évolution stylistique :

L’église de Justinien était ornée d’œuvres non-figuratives : les murs lisses de l’étage inférieur étaient couverts de panneaux en marbre de formes diverses, les dalles généralement fendues et ouvertes pour former des motifs symétriques. Quant aux murs supérieurs curvilignes, ils étaient entièrement décorés de mosaïques aux dessins floraux et géométriques se détachant d’un fond doré. La raison pour laquelle ni le Christ ni ses saints ne sont représentés est encore un mystère. Peut-être qu’à cette époque, l’usage de représentations figuratives était déjà controversé, ce qui sera réellement le cas quelques années plus tard, avec l’iconoclasme.

Après la crise iconoclaste, le programme des peintures murales évolue.

La Vierge, instrument de l’incarnation, prend place dans l’abside. Elle est représentée avec ou sans l’Enfant et presque toujours adorée par deux anges. Le Christ en buste (Christ Pantocrator), image de la Toute-Puissance divine, la domine dans la coupole. Des anges et des apôtres l’entourent. Les événements évangéliques les plus marquants, occupent les parties hautes des édifices (lunettes, voûtes). Leur nombre varie selon les époques. D’abord sept puis douze, dont Annonciation, Nativité, Présentation au temple, Baptême, Transfiguration…

La descente du Christ aux limbes est à Byzance l’image de la résurrection. Elle montre le Christ brisant les portes de l’enfer, tout de suite après sa mort, pour enchaîner Satan et libérer Adam et Ève, symbole de l’humanité.

Les murs et les piliers des parties hautes de l’église sont occupés par les représentants de l’Église en la personne des patriarches de l’Ancien Testament, des prophètes, des apôtres et des martyrs.

Ainsi les représentants des hommes relient les sphères célestes (abside, voûtes, coupoles) au monde terrestre et aux chrétiens assemblés.

La basilique Sainte Sophie : mosaïques du milieu de la période byzantine.

Des mosaïques somptueuses ornent les murs de la basilique. Ces œuvres qui tapissent l’abside de Sainte Sophie sont d’une majesté et d’un éclat incomparables.
Elles témoignent d’une ambition artistique à couper le souffle.

La majorité des mosaïques de la basilique Sainte Sophie datent du milieu de la période byzantine, période qui s’étend de la restauration du culte des images en 843, après l’iconoclasme jusqu’à la chute de Constantinople aux mains des soldats de la quatrième croisade en 1204.

Le grand style classique de Byzance s’affirme dans des ensembles de mosaïques d’une majesté et d’un éclat incomparable.

Cette floraison est préparée déjà au IXe, comme le montrent les mosaïques dans l’abside de Sainte Sophie (la Vierge à l’Enfant), à l’église de la Dormition à Nicée ou à Sainte Sophie à Salonique.

Pour le passage du XIe au XIIe, il y a les mosaïques d’une grande force expressive du monastère Saint Luc en Phocide et celles de Sainte Sophie à Constantinople.

Ce programme ira avec le temps vers un enrichissement et une complexité croissants.

Au XIe, s’y ajoute la Communion des apôtres, dans l’abside. Elle montre le Christ au ciel distribuant le pain et le vin aux apôtres. Sous cette image au registre inférieur de l’abside, apparaissent les saints évêques, d’abord vus de face, puis à partir de XIe-XIIe vus de trois quart et officiant. C’est à cette même période qu’apparait le Christ flanqué de saint Jean Baptiste et de Marie.

Au XIIe les artistes réalisent une immense composition, le Jugement dernier.

Parmi les plus belles de ces compositions à plusieurs registres, il y a celle de la cathédrale de Torcello, en Vénétie et de Saint Dimitri de Vladimir au nord de Moscou où la fresque du jugement dernier est parfaitement intégrée à la nef centrale.


B/ s’adapter aux religions

Sainte Sophie reflète la diversité de l’héritage de Constantinople qui fut la capitale successive des empires romain, byzantin et ottoman.

Sainte Sophie est une basilique chrétienne, en 146 av.J.C. les romains conquirent la Grèce.

En 330 Constantinople avec Constantin, devint la 2ème capitale de l’empire romain.

En 393, le christianisme devient la religion officielle de l’empire romain.

En 1054, schisme entre les chrétiens.

En 1453, le sultan Mehmed II entre dans l’ancienne capitale byzantine.
Le sultan est émerveillé devant la basilique Sainte Sophie, pour la protéger des destructions, il la fait transformer en mosquée.

Il modifie son architecture en ajoutant 2 minarets, Selim II en ajoutera 2 supplémentaires.

Les mosaïques sont recouvertes par du plâtre.
Un croissant de lune remplace la croix qui surmonte la coupole.

Sainte Sophie est à la frontière entre l’Orient et l’Occident.

Cette basilique correspond au besoin de rêve, de merveilleux et de la volonté d’éblouir des byzantins comme des musulmans.

 

Conclusion

La ville a changé trois fois de nom :
Byzance est devenu Constantinople puis Istanbul
.

Byzance : VIIe av.J.C. colonie grecque de Bysantium

Constantinople : 330, fondation par l’empereur romain Constantin 1er

Istanbul : 1453, la ville rebaptisée devient turque et musulmane.

Sainte Sophie basilique chrétienne fut transformée en mosquée en 1453 (par le sultan Mehmed II)

En 1953, le gouvernement d’Ankara décide de transformer la mosquée en musée.

Depuis l’année 2000, Sainte Sophie est redevenue une mosquée, le président islamo-conservateur, Erdogan en a décidé ainsi.

Classée au Patrimoine mondial, Sainte Sophie reste accessible aux visiteurs non-musulmans.