Peter Lanyon (1918-1964)
Thermal
1960
Huile sur toile
Dim 183 x 152 cm
Conservé à la Tate Gallery à Londres
Le peintre
Peter Lanyon naît à Saint Ives en Cornouailles.
Il commence par des leçons de Borlase Smart.
En 1937, il suit les cours de Victor Pasmore à l’Euston Road School.
De 1940 à 1945, il combat dans la Royal Air Force.
En 1947, il expose au Salon des Réalités Nouvelles.
À partir des années 1950 il devient une des figures marquantes de l’École de Saint Ives parmi lesquels on trouve Barbara Hepworth, Ben Nicholson, Terry Frost, Patrick Heron.
En 1950, a lieu à Londres sa première exposition personnelle.
En 1954, il reçoit le Prix de la critique britannique.
En 1957, il s’intéresse aux peintres américains qu’il rencontre à New-York en particulier Motherwell et Rothko.
Conscient de l’impasse dans laquelle se trouve la tradition du paysage britannique, il cherche de nouvelles solutions.
En 1959, Il débute la pratique du vol à voile pour selon ses mots avoir une connaissance plus approfondie du paysage.
Sa pratique artistique se conjugue avec les nombreuses rencontres d’artistes, visites d’atelier qu’il fait aux États-Unis, au Mexique et en Tchécoslovaquie.
Marié et père de six enfants, il meurt dans un accident de planeur le 31 août 1964.
Le tableau
En 1959, il découvrit le vol à voile ; l’expérience va définir un style plus fluide et délié, qui tente de capturer des sensations inédites du temps et de l’espace, et inspirera une série de tableaux, parmi lesquels Thermal, dont les superpositions de bleu et de blanc distillent une impression grisante de suspensions atmosphériques.
Composition
La composition est dynamique.
Les teintes sont vibrantes.
Le regardeur a une sensation de mouvement et de profondeur.
Peter layon suggère les rythmes en constante évolution de la mer de Cornouailles.
Ce tableau est une impression abstraite d’un des vols à voile de Peter Lanyon
L’air bleu se fond dans la terre et dans l’eau.
Le regardeur ressent la profondeur.
La couleur règne en maître.
L’atmosphère claire de ce tableau est due à la couleur.
L’artiste fait de la forme picturale une partie intégrante de l’espace ambiant.
Il crée un sentiment spatial avec l’illusion du mouvement grâce aux effets perspectifs.
Plutôt que d’espaces positifs et négatifs, le regardeur voit des espaces clairs et sombres, le mouvement de la houle.
Peter Layon développe son sens de la forme et de l’espace comme une expérience cinétique.
La pâte est fluide, la touche légère, la couleur juste.
L’ensemble de la toile est tissé de lignes qui en composent la structure et se poursuivent sans se mêler.
Cette eau se profile sur un fond de camaïeu aux nuances subtiles grâce aux gris colorés inventés par la Renaissance.
Gris foncé passant aux gris blancs et gris teintés ponctués de bleu qui sont autant de lumières guidant le regardeur dans les profondeurs de l’eau.
Considérée du point de vue de la perspective et de la profondeur cette toile apparaît comme une vue aérienne.
Sur le côté gauche un mouvement en spirale, un tourbillon, vient mourir dans la vision frontale.
Analyse
Parallèlement à l’essor de l’expressionisme abstrait aux États-Unis, l’Europe vit émerger après-guerre des styles abstraits expressifs très éloignés de l’abstraction géométrique rationnelle de Piet Mondrian ou Kasimir Malevitch. Ces tendances sont souvent regroupées sous le nom d’art informel.
Saint Ives, modeste village de Cornouailles devint le lieu de résidence de plusieurs peintres abstraits de la génération d’après-guerre en Angleterre, notamment Ben Nicholson, Peter Lanyon et Patrick Heron.
L’art de Peter Lanyon est porteur d’une esthétique nouvelle, l’expressionisme abstrait.
C’est un art, brut, vrai, vivant, viril qui s’oppose au raffinement maniériste de Paris.
Peter Lanyon refuse la suprématie de l’intelligence dans sa peinture, pour lui, le sujet avec lequel il s’identifie depuis son enfance, c’est sa Cornouailles natale, paysage de rochers escarpés résistants depuis l’origine du monde aux violents assauts de trois mers.
Paysage qui remonte bien au-delà de l’histoire et de la préhistoire et qui appartient aux mythes et aux sages.
Ce thème de la Cornouailles est constant dans l’œuvre de Lanyon.
Ce tableau résonne avec un profond sentiment de lieu et de mouvement.
Peter Lanyon combine des valeurs abstraites avec des idées radicales sur le paysage et la figure.
Commencé comme un passe-temps, le vol à voile est largement utilisé dans ce tableau.
Il mélange les éléments d’abstraction avec un sens profond du lieu.
La mer de Cornouailles émerge de ses coups de pinceaux audacieux et expressifs.
Peter Layon capture l’énergie brute et la puissance du monde naturel.
Il explore le potentiel expressif de la couleur, de la forme et de la texture.
Ce tableau est construit dans un espace tridimensionnel définit par des articulations.
Ce n’est pas un tableau de masses et de volumes.
Peter Lanyon peint de la couleur à la matière, la ligne et la transparence, plutôt que la masse et le volume.
Au système mimétique qui vise à la reproduction des apparences succède un mode de représentation par analogie des processus et des manifestations du monde phénoménal : lumière, couleur, espace.
Face à son paysage Peter Layon analyse les caractéristiques formelles de manière à pouvoir les recréer mentalement.
La nature est une référence dans un sens élargi, elle est indissociable de l’histoire culturelle.
L’art de Peter Layon est une expression de sa pensée.
Dans les années 50, ce propos est renforcé par la diffusion rapide du discours sur l’expressionisme américain : ces peintres auraient su imposer un langage profondément original dans un contexte hostile marqué par l’incompréhension. Pour les artiste anglais cette rupture semble subie plutôt que désirée car, selon leurs témoignages elle serait imposée par la Seconde Guerre mondiale.
Les artistes anglais préfèrent s’inscrire dans la tradition d’un modernisme réinventé. Ils embrassent une tendance artistique dérivée du constructivisme qui se veut par essence universel.
Leurs œuvres appellent le regardeur à une interaction directe.
Peter Lanyon mélange le ciel et l’eau, il crée une toile où se reflètent toutes les convulsions de l’eau et tous les rythmes du ciel.
Il n’y a pas de vide, le tableau pourrait se prolonger au-delà du cadre.
L’espace est expansible.
Ce tableau doit tout à la contemplation.
Peter Lanyon a observé attentivement la nature, il exprime ce grand mouvement que fait l’eau. Les plans s’étendent et se superposent, il y a de la profondeur.
Les principes abstraits qui sont à la base de son œuvre, apparaissent comme un moyen de réaliser ce qui, depuis 1950, peut être appelé son style ou
« l’atmosphère » de sa peinture : expressionisme imaginaire.
Ce n’est pas un expressionisme abstrait, ce n’est pas non plus un expressionisme réaliste car il tend vers le signifiant et l’universel et non vers le détail éphémère. Ce n’est pas non plus une expressionisme symboliste, car il ne remplace pas la réalité par le symbole mais par une réalité humaine qui est l’aboutissement de la lutte créatrice entre réalité dite objective et la perception compréhensive propre à un tempérament artistique.
Pour Peter Lanyon ses sensations sont aussi concrètes, aussi réelles et aussi vraies que le granit des rochers de Cornouailles.
En se détourant du réalisme figuratif, Peter Lanyon ne s’est pas éloigné de la réalité, il a élargi la notion de réalité.
L’art abstrait est une nouvelle conception de l’acte de peindre, Peter Lanyon pose son regard sur le monde et sur lui-même.
Il a modifié la représentation de l’eau en énigmes et métamorphoses.
Il n’y a plus de matière mais l’illusion d’une matière.
Tout se perd en éclats et en cycles d’énergie, en formes insaisissables.
Entité concrète de l’eau, l’espace n’est plus que la forme générale de ses phases successives.
À l’espace des objets se substitue un champ illimité à la surface duquel se distribuent des objets d’espace.
La réalité de l’image peinte était une réalité d’allusion.
De cet espace imaginaire, l’art a fait une réalité concrète qui ne doit rien qu’à soi.
L’eau est cet espace faite d’énergies et de rythmes, d’intensité et de contrastes qui naissent des images de l’imaginaire.
Le tableau est un espace ouvert sur des perspectives sans limites. La lisière du tableau ne le termine pas.
« Pour moi déclare Peter Lanyon, la peinture est difficile et secrète…Faire se souvenir les gens de leurs racines, tel est le but de mon œuvre ».
Conclusion
Peter Lanyon est un peintre de paysages de Cornouailles devenu une des figures majeures de l’Abstraction britannique.
Il est aussi connu pour ses sculptures assemblages, ses collages et ses poteries.
Sources :
Pour la biographie : Wikipédia
Article de J.P. Hodin dans la revue : XXe Équivalences et Confrontations –N°22 -1963
Cahiers d’art publiés sous la direction de G. di San Lazzaro – 1967 : Bilan de l’art abstrait dans le monde.