la main parle

 

La main gauche embijoutée tient un éventail entre le pouce et l’index … 

À propos de l’éventail :

Le premier éventail est apparu sur les rives du Nil.
Par l’agitation de la feuille de palmier tressée les égyptiens obtenaient une ventilation parfaite pour séparer les grains de blé de la paille. Ils s’en servaient aussi pour s’éventer et chasser les insectes.

Le constat le plus ancien pour l’éventail-écran date du VIIe av.J.C. en Chine et de 877  pour l’éventail plié au japon. Les japonais auraient pris comme modèle les ailes de chauve-souris.

Les premiers éventails européens sont les chasse-mouches utilisés lors des rituels liturgiques.
C’est seulement au XIVe que l’usage de l’éventail passe dans la vie civile.

Parmi les marchandises apportées d’Orient par les portugais se trouvent les premiers éventails pliés.

Ce sont les italiens et Catherine de Médicis qui lancent la mode de l’éventail plié à la cour française et autres cours européennes.

C’est au XVIIe que se généralise l’usage de l’éventail dans toute l’Europe.

C’est en France en 1678, que se constitue la première corporation de « maîtres d’éventails ». L’éventail est un accessoire de luxe. Il se pare de matières rares et raffinées comme l’écaille brune ou blonde, l’ivoire, les incrustations d’or et d’argent ou de pierres précieuses.
L’éventail se renouvelle sans cesse. Sa dimension, son envergure, les matériaux mis en œuvre comme les décors sont soumis aux caprices de la mode. L’éventail propose une face et un revers.
La virtuosité des peintres et tabletiers se révèle dans les détails raffinés des feuilles comme des montures.
Ce sont aussi des innovations techniques et pratiques comme des ajouts d’optique, lunettes et loupes ou de tubes à parfum miniature pour laisser un sillage délicat derrière soi.

C’est à la fin du XVIIe que l’éventail perd de son sens doublement utilitaire, comme chasseur de mouches et éventeur, pour gagner en valeur significative.

Les espagnoles sont les premières à se servir de l’éventail de manière osée.
Elles en font  un instrument privilégié de séduction.

Ce langage gestuel, fondé sur le maniement riche de sens de l’éventail va se développer au XVIIIe de manière prodigieuse.

Les coquettes en font un prolongement de leurs propres corps, un outil de communication d’autant plus expressif qu’il est gestuel. L’éventail octroie à la femme un pouvoir extraordinaire.
Puis il devient l’élément indispensable de la tenue libertine.
La libertine ne saurait se passer de ce masque séduisant et diaboliquement invincible.

L’éventail oriental, transposé dans la France du XVIIIe, sert à la femme comme masque exotique de séduction, comme arme libertine contre l’homme, comme atout premier de la tenue féminine qui symbolise son indépendance.

La peinture du XVIIIe est parsemée d’éventails.

L’art de s’en servir a permis d’exprimer les états d’âme, du badinage aux déclarations d’amour dans un langage crypté secret. Selon ses positions et ses orientations, il exprimait l’amour, l’indifférence, le dédain ou la jalousie.

Au XIXe à Londres est publié par Duvelleroy, un petit fascicule contenant les signes d’un « langage de l’éventail ».
La presse féminine trouvant ce langage sémaphorique amusant en parle mais les historiens ont démontré que ce langage n’est jamais entré dans les mœurs de l’époque.

Dans ce portrait,  Madame Moitessier tient l’éventail fermé, dans sa main gauche.  L’éventail  agrémente sa toilette et tempère l’abondance de bijoux !

L’éventail dans ce tableau a un statut de complément féminin.
Une femme bien née ne saurait se passer de cet instrument de pudeur et d’envoûtement.

Pour voir le portrait de Madame Moitessier d’Ingres,  aller sur l’index des artistes ou à Washington DC, à la National Gallery of Art.