La joie de vivre -Henri Matisse

Henri Matisse (1869-1954)

 

La joie de vivre

1905-1906
Huile sur toile
Dim 174 x 238 cm

Conservé à la fondation Barnes près de Philadelphie

 

Sujet

Dans un paysage idéalisé, femmes et hommes nus se prélassent, s’embrassent, jouent de la musique ou dansent.

Cette toile est un hymne à la beauté de la couleur, des corps et des arts.

 

Composition

Trois plans s’étirent sur la toile.
Au premier plan : sont allongés une allégorie de la musique et un couple enlacé
Au second plan : s’étire une vénus anadyomène devant laquelle se tient un personnage accroupi (comme un coquillage) et, en retrait, un couple de muses enlacées. Ces personnages occupent la gauche du tableau. Au centre deux vénus alanguies l’une allongée tourne de dos, l’autre à demi relevée et déhanchée retient sa chevelure dans un geste très sensuel. Sur la droite du tableau un berger (allégorie de la musique) joue de la flûte debout.
Au troisième plan, un groupe de danseurs forment une ronde au milieu de la toile.

La ligne d’horizon qui s’étire en bleu et violet dans le fond du tableau représente une rivière surmontée d’un ciel rose qui ferme la composition.

La rivière est la seule ligne droite du tableau.

Tous les personnages sont encadrés par une forêt d’arbres qui s’ouvre au centre du tableau, formant un écrin aux personnages.

Il n’y a pas de réelle perspective, ce sont les tailles des personnages qui permettent au spectateur d’étager les plans.

La toile est composée de longs traits étirés et ondulés, formant une ligne en arabesque qui dessine les troncs des arbres, surligne les corps des personnages et évolue des feuillages au ciel.

Il n’y a pas de lumière naturelle, ce sont les couleurs vives qui éclairent le tableau.

Les couleurs irréelles sont posées en grands aplats de couleurs pures nettement délimités. Les verts, les rouges et les roses des feuillages éclairent le jaune de l’herbe qui devient bleue et verte au premier plan.

Une grande clarté émane de ce tableau à l’équilibre parfait.

De cette symphonie de couleurs vives, de ces formes douces et ondulées, se dégage une sensualité et une grande joie de vivre.

 

Analyse

 

La joie de vivre ou comment Matisse interpréte les leçons des Maîtres.

En ce début du XXe Matisse, nourri des grands maîtres traditionnels, dessine les courbes des corps, forme toutes sortes de poses, comme autant d’études pour ses tableaux à venir.

Au second plan on reconnait la pose qu’aura le modèle dans Le nu bleu (souvenir de Biskra) de 1906 et au troisième plan la ronde des danseurs est la représentation réduite de La danse II de 1909-1910.

Écoutant Cézanne, Matisse sait qu’il ne faut pas chercher à imiter et qu’il doit transcender l’héritage des maîtres en écoutant ses propres sensations.

Dans La joie de vivre il transpose avec beaucoup de bonheur les leçons apprises dans les musées et parvient à nous transmettre dans son tableau sa propre émotion.

Le spectateur reconnaît l’influence de Cézanne pour la composition (On pense aux Grandes Baigneuses –1894) de Gauguin pour la facture(On pense à Source miraculeuse –1894) et d’Ingres dans sa façon de définir les courbes et les formes très sensuelles de ses nus (On pense au Bain Turc –1862).

Dans La joie de vivre la couleur prédomine et le traitement de l’image est lié aux sentiments de Matisse et non à la représentation exacte de la réalité.

Avec cette nouvelle manière de peindre Matisse nourrit la toile de ses émotions propres. Dans La joie de vivre le spectateur ressent la douceur et la volupté de l’instant.

 

Conclusion

La joie de vivre est considérée comme l’une des sources de l’art du XXe, Picasso s’en souviendra au moment de peindre Les Demoiselles d’Avignon en 1907.

Matisse avec son utilisation des formes ondulées et des couleurs fortes, aura influencé Derain et Vlaminck, puis les peintres expressionnistes et les surréalistes.

On pense à Dali qui aborde les formes aux traits fluides et ondulés dans Persistance de la mémoire -1931