Enlèvement de Perséphone, 350 av.J.C. / Banquet,  325-300 av.J.C. / Hadès et Perséphone, 340 av.J.C. Peintures funéraires à la fin de l’âge classique

Peintures funéraires à la fin de l’âge classique

 

Enlèvement de Perséphone

340 av.J.C.

Peinture n°1 : fresque

Dim 100 x 350 cm

Tombe dite de « Perséphone à Vergina »


Banquet

 325-300 av.J.C.

Peinture n°2 : fresque

Dim H : 35 cm

Tombe d’Agios Athanasios, près de Thessalonique.

 

Hadès et Perséphone

 340 av.J.C.

Peinture n°3 : pigments sur marbre

Dim 48 x 80 cm

Tombe dite « d’Eurydice à Vergina ».

 

La peinture funéraire à la fin de l’âge classique

Les écrivains antiques ont chanté les louanges de nombreux peintres grecs des périodes archaïques et classique, mais jusqu’à récemment, aucune n’était attribuables avec certitude aux célèbres peintres de l’âge classique comme Polygnote, Apelle, Zeuxis et Parrhasios.

Toutefois, cet état de fait changeat à la fin du XXe, avec la découverte en Grèce septentrionale de tombes richement peintes.

Jusque-là, seule la peinture sur vase fournissait un aperçu de la grandeur de la peinture murale et sur panneau grecque. De célèbres tableaux classiques étaient souvent copiés dans les fresques murales romaines, mais il n’était pas toujours simple de se faire une idée précise de l’original.

Dans le dernier quart du XXe, des archéologues travaillant en Macédoine, dans le nord de la Grèce, découvrirent une série de riches tombes qui conservaient des fresques murales à grande échelle qui, bien que n’étant pas de la main des vrais maîtres de l’époque classique, corroborent ce que les sources littéraires nous apprennent sur les peintres grecs antiques.

Ces œuvres qui présentent une qualité inégalée avec les fresques romaines, nous montrent à quel point l’art de la peinture a pu s’élever en Grèce.

Le fait d’avoir enseveli ces œuvres dans de grands tumulus peu après leur exécution permit leur conservation.

Malgré la complexité de leur composition et l’éclat de leurs couleurs, ces fresques furent exécutées au pinceau directement sur les murs ou sur d’autres surfaces, comme le trône de marbre trouvé dans la tombe d’Eurydice, (peinture n°3).

La fresque a tempera était le médium le plus employé, même si les sources littéraires ne parlent presque exclusivement que de la technique encaustique (à base de cire), sans doute parce que celle-ci était exceptionnelle.

La liste la plus complète des pigments utilisés dans la peinture grecque nous vient de l’écrivain romain du 1er siècle, Pline l’Ancien, dans son Histoire naturelle.

Enfin l’analyse chimique des œuvres qui subsistent permit d’identifier la présence fréquente de pigments tels que le bleu égyptien -obtenu à partir de chaux, de sable et de minerai de cuivre, le blanc de carbonate de calcium, le vert de malachite, l’ocre et le noir de fumée.

La gamme des pigments seule ne suffit pas à définir la richesse des coloris, des pigments identiques peuvent produire des effets esthétiques différents selon les modes de leur emploi (saturés ou dilués, purs ou mélangés) de leur application ainsi que selon le nombre et la qualité des mélanges effectués entre eux.

Quel critère guidait le peintre dans le choix de ses pigments, la qualité du décor, les facteurs économiques, les paramètres géologiques.  L’application sophistiquée de ces pigments révèle un savoir-faire et une connaissance approfondie des propriétés des matériaux utilisés.

Les évolutions de la perspective, du raccourci, des ombres et des reflets apportaient davantage de réalisme aux scènes décrites. Les paysages, en général suggérés dans les périodes précédentes, sont parfois traités avec beaucoup d’attention dans les peintures macédoniennes. Les lignes et les couleurs permettent des compositions complexes et la présence de personnages réalistes en mouvement dans un espace habilement défini.

 

Enlèvement de Perséphone

Cette magnifique fresque de la tombe dite de « Perséphone à Vergina » montre Hadès, le dieu des Enfers, emportant Perséphone, qui lutte violemment pour échapper à son étreinte.

Son chariot à deux chevaux est mené par le dieu Hermès, tandis que les compagnons de Perséphone s’enfuient épouvantés.

La peinture est d’une vigueur extraordinaire. Le trait est rapide, mais des ombres subtiles apportent du volume aux visages et aux drapés, et la perspective crée une illusion de profondeur.

Les murs adjacents étaient décorés de figures correspondantes ; les trois Parques et Déméter pleurant pour sa fille symbolisent le lien entre les survivants et le défunt.

 

Banquet

Découverte en 1994, la tombe d’Agios Athanasios, près de Thessalonique, présente une large façade devant une chambre carrée surmontée d’une voûte en tonneau.

Une frise de têtes de taureaux, des rosaces et un bouclier peint décorent l’intérieur de la chambre, mais le fleuron de la tombe est sa façade.

Sous un fronton décoré de griffons, une fresque aux couleurs vives de 3,8 mètres de long présente 25 personnages repartis en trois sections.
Au centre se tient un banquet, ou des couples d’hommes et de femmes partagent des banquettes, allongés sur des coussins multicolores.
Tous portent des couronnes tressées et les femmes tiennent des cornes à boire tandis que les hommes écoutent des musiciennes, dont l’une joue de la cithare, l’autre de la flûte double.
Sur le bord gauche se tient un éphèbe nu.
Devant les couples, on trouve des tables de toutes les formes chargées d’œufs, de fruits et de gâteaux.

Toutes les figures présentent les éléments d’une gestuelle destinée à donner l’apparence du vivant.

Certains détails, comme le groupe de fêtards approchant à pied et à cheval, à gauche du banquet central ou les huit hommes en tenue militaire à droite, n’apparaissent pas ici.

 

Hadès et Perséphone

Cette sublime peinture décorait l’arrière d’un grand trône de marbre retrouvé dans la chambre funéraire principale de la tombe dite « d’Eurydice à Vergina ».

Dans un épisode plus calme que celui décrit dans Enlèvement de Perséphone.

Une scène montre Hadès conduisant un chariot, vêtu d’un chiton (tunique) et d’un himation (manteau) tenant les rênes des chevaux cabrés d’une main et un aiguillon de l’autre.
Derrière lui se tient son épouse, Perséphone, habillée de la même manière et tenant un sceptre, un pan de son himation couvrant sa tête comme un voile.

L’artiste a opté pour une rarissime composition frontale, mais afin de ne pas masquer les personnages, il a divisé l’équipage et représenté les chevaux de trois quarts.

Les chevaux blancs du centre font ressortir les personnages dans leurs vêtements rouges, tandis que les chevaux bais encadrent la scène.

La force et la rectitude du trait, la précision du mélange de couleurs (leurs contrastes particulièrement bien préservés sur la tête des chevaux), la justesse des ombres (utilisées en clair-obscur) et le calcul des grandeurs est étonnamment moderne.

 

Conclusion

Ces fresques représentent des témoignages précieux sur les réalisations de la peinture grecque. Les peintures funéraires sont nées d’expériences multiples dans l’emploi de la couleur et révèlent l’intention de l’artiste d’obtenir pour chaque représentation, un résultat esthétique particulier.

Il est significatif de considérer la diversité de coloris qui apparaît sur les peintures découvertes dans la nécropole de Vergina-Aigai et la tombe d’Agios Athanasios, près de Thessalonique :

L’emploi d’une gamme de pigments très variée sur Hadès et Perséphone rehaussés par l’application généreuse de pigments brillants et de la feuille d’or -des matériaux précieux ; une palette restreinte où prévalent les tons chauds des bruns et des rouges violets sur l’Enlèvement de Perséphone ; une gamme de pigments peu variée mais un coloris riche sur la scène du Banquet, où le peintre parvient à créer un effet chromatique très subtilement nuancé et un équilibre sophistiqué entre les tons froids et chauds de la composition.

L’abondance des peintures murales marque l’importance du rôle du peintre.

Les matériaux employés, leurs propriétés et qualités sur leur mode d’application sont des témoignages précieux des processus de création d’une image ancienne.

Hariclia Brécoulaki (article sur la technique de la peinture grecque ancienne d’après les monuments funéraires de Macédoine –2000- revue Persée) :
C’est « l’importance de l’expérience et du savoir-faire des peintres dans la création de nouvelles teintes destinées à élargir leur palette et à obtenir des effets visuels particuliers, au moyen de mélanges de pigments sophistiqués, par des techniques de superposition de couche colorée ou par mélange réel. C’est à ces pratiques que se mesurait, en fait l’habileté des grands peintres grecs. »

Ce sont les tombes les mieux conservées, l’art funéraire, exceptionnellement conservé grâce à une éruption volcanique permet de découvrir et de décrypter les civilisations disparues.

Les stèles funéraires de la fin de l’âge classique, les vases peints, les peintures ont un sens qui est loin d’être connu.
Les scientifiques et les archéologues s’emploient à leur arracher leurs secrets.

Chaque tombe est un témoignage qui rend compte à la fois d’un héritage esthétique et d’un choix moral compris du public pour devenir un mémorial pour toujours.