Procession des Rois mages – 1459-1462 Benozzo Gozzoli

 

Benozzo Gozzoli (1420-1497)

 

Procession des Rois mages

1459-1462

Fresque

Hauteur environ 3m

Conservée in-situ, dans la chapelle des Mages, Palais Medici-Riccardi à Florence

 

Le peintre

Gozzoli arrive à Florence avec sa famille en 1427.
Il devient l’apprenti de Fra Angelico.
Puis entre 1444 et 1447 il travaille comme orfèvre dans l’atelier de Ghiberti.
En 1447 il accompagne Fra Angelico à Rome, le pape Eugène IV a commandé des décorations au Vatican.il suivra également Fra Angelico en Ombrie où il réalisera des fresques sur la voûte de la cathédrale d’Orvieto.
Benozzo Gozzoli acquiert une grande renommée de décorateur.
En 1449 il quitte Fra Angelico et reste en Ombrie pour réaliser différentes fresques dans les monastères et les églises jusqu’en 1452.
Après un séjour de travail à Pérouse, il revient à Florence en 1459 pour réaliser l’œuvre majeure de sa carrière : La chapelle des Mages.
Entre 1468 et 1484, il est à Pise où il ouvre un atelier pour exécuter les fresques de 22 scènes bibliques du Camposanto qui est le cimetière historique monumental de pise. Benozzo Gozzoli recouvre entièrement à fresque avec les histoires de l’Ancien Testament, les murs de l’allée ouest de la chapelle Aulia. Le cimetière comporte trois chapelles.
En 1478 les autorités de Pisan lui donnent comme marque de respect un tombeau au Campo Santo.
En 1495 il retourne à Florence.
Il meurt de la peste à Pistoia en 1497.

 

La fresque

La chapelle des Mages est un ensemble de fresques situé à l’étage noble -premier étage, du Palais Medici-Riccardi à Florence.

Une volée d’escaliers débouche directement sur un espace exigu distribuant deux salles.
On se retrouve nez à nez avec un cortège de Rois mages déployé sur trois murs.

On accède à la chapelle par le mur Sud, au Nord il y a le renfoncement de l’autel, seuls les murs Ouest et Est sont entièrement recouverts de fresques.

Le sol est incrusté d’une mosaïque de pierres de couleur inspirée des modèles antiques. Le long des murs sont alignés des sièges en bois richement sculptés.
Au plafond, s’intercalent des panneaux de bois et des panneaux dorés disposés avec soin.
Sol et plafond forment un écrin pour la fresque panoramique qui encercle toute la chapelle.

La chapelle du palais Médicis constitue l’expression la plus magique de dévotion privée et d’orgueil familial dans la Florence du quattrocento.

Réalisée par Benozzo Gozzoli, la fresque représente en détail le cortège des Rois mages.

Les sages venus d’Orient cheminent dans un paysage vallonné pour adorer la Vierge et l’Enfant.
La Vierge et l’Enfant figurent sur un panneau séparé au-dessus de l’autel.

 Le cortège représente les membres de la famille Médicis.
Les personnages sont d’une magnificence digne de la maison des Médicis.

La fresque se déroule comme une tapisserie sur les murs de la chapelle.

La procession commence sur le mur Est.
-avec Gaspard représenté par le patriarche de Constantinople Joseph II, chef de l’église orthodoxe.
Le milieu du cortège se poursuit sur le mur Sud
-avec Melchior représenté par Sigismond de Luxembourg. Une autre théorie opte pour Jean VIII Paléologue de Byzance, empereur byzantin.
Le cortège se termine sur le mur Ouest.
-avec Balthazar, le plus jeune, représenté par une version idéalisée de Laurent à la tête du défilé constitué par les membres de la famille Médicis. Autre théorie, Gaspard serait le jeune fils de l’empereur byzantin.
Au Nord de la pièce, un renfoncement abrite l’autel. Un retable de Filippo Lippi est placé au-dessus de l’autel.il représente la Vierge adorant l’Enfant. Les murs du chœur sont peints et représentent des anges. Le chœur forme un lieu distinct, séparé du reste de la pièce.

 

Composition

Sur le mur Ouest, le plus complet, la fresque étudiée :

Deux plans :
À l’arrière-plan, un paysage vallonné inspiré de la campagne florentine s’étage en massifs montagneux.
Ce paysage a des allures de décor de carton-pâte et des airs de paradis.
Le château au sommet de la plus haute colline, fait référence à la résidence de Caffagiolo appartenant aux Médicis.
La colline est représentée schématiquement, les près sont calés entre les rochers, les chemins serpentent en montant. Les arbres sont stylisés.
Ce décor est animé par une battue de chasse, des chasseurs et des chiens sont à la poursuite d’un chevreuil.

Au premier-plan, un éclatant cortège formé par le Roi mage et sa suite.
On identifie le jeune Balthazar de profil en costume jaune, la tête tournée vers le spectateur, c’est Laurent de Médicis ou Démétrius (selon les interprétations).
Deux personnages à bonnets rouges le suivent, l’un monté sur un âne est le chef de la famille des Médicis, Côme 1er, le second monté sur un cheval blanc est, Pierre de Médicis son fils dit « le goutteux ».
Suivent les « politiques »

Les vêtements sont somptueux
Une grande attention est apportée aux détails, cette minutie fait référence à son travail d’orfèvre. Les harnachements sont peints avec un soin de ciseleur.
On observe par exemple, les clous sur les sabots des chevaux ; sur les harnachements de cérémonie on reconnait le blason des Médicis, les cercles représentant des boules.

Pour obtenir ces couleurs brillantes, Benozzo Gozzoli a peint les grandes masses à fresque sur l’enduit frais. Puis il rajouté tous les détails à sec pour avoir la finesse du trait.
C’est ce mélange de techniques qui rend la fresque exceptionnelle.

La fresque est baignée de la clarté de la lumière -comme le sont les tableaux des peintre flamands.

La facture est extrêmement raffinée, conçue et réalisée à la lumière des bougies, aucune autre fresque de Florence n’a la vivacité des couleurs de la chapelle des mages.

Ces couleurs saturées sont surprenantes et réjouissantes.
Elles donnent à la chapelle des allures de coffret à bijoux.
La brillance évoque les tableaux des peintres du Nord, on pense à Van Eyck.

 

Analyse

L’Adoration des mages était un thème très populaire depuis les années 1300 à Florence.
Tous les ans, le jour de l’Épiphanie, une procession d’acteurs en costume traversait la ville avant d’interpréter une pièce devant le baptistère.
L’acte I décrivait la rencontre des Rois mages avec Hérode.
L’acte II montrait l’offrande des présents à Jésus
L’acte III reconstituait le massacre des innocents.

Pour cette raison, le thème des rois mages était très populaire dans le milieu artistique.

Les grandes cours princières du Moyen-Âge voyaient une occasion de se faire représenter en habits somptueux entourés de leur suite.

Côme 1er de Médicis (1389-1464) souverain officieux de la ville, chercha à asseoir son pouvoir en se proclamant dirigeant et bienfaiteur de la Compagnie des mages.

Il fait construire son palais entre 1444 et 1484, selon les plans de Michelozzo di Bartolomeo, influencé par l’architecture romaine et le travail de Brunelleschi.
Ce palais de style Renaissance est voisin de la cathédrale de Florence et à côté de l’église San Lorenzo.
Côme y emménage à partir de 1457.

I-A : Le cortège représente les membres de la famille Médicis.

Les fresques de Benozzo Gozzoli regorgent de détails reliant les récits bibliques aux Médicis. Les personnages sont d’une magnificence digne de la maison des Médicis.

Le mur Ouest -la fresque étudiée, est occupé par un portrait de groupe de la famille.
Côme, le patriarche est vêtu d’un brocard bleu et coiffé d’un béret rouge ; Pierre, son fils est un homme grisonnant coiffé d’un béret rouge et vêtu d’un pourpoint de brocard vert brodé d’or, il monte un cheval blanc. Ils sont reconnaissables à leur profil (le même que sur les médailles).
Derrière eux sont représentés les alliés :
Le jeune-homme au bonnet rouge situé entre les deux têtes de chevaux blancs est Galeazzo M. Sforza -héritier du duché de Milan.
Derrière lui, reconnaissable à son profil, coiffé d’un bonnet rouge, le jeune Laurent, futur héritier.
Le cavalier montant un cheval bai, en bordure de fresque est Sigismond P. Malatesta, est le seigneur de Rimini, un condottière et ami des humanistes.
Devant, en tête de cortège, sur un cheval blanc, un superbe jeune-homme en brocard doré et en chausses rouges est pour certains historiens, un portrait idéalisé de Laurent, petit-fils de Côme, qui deviendra plus tard, Laurent le « Magnifique » pour d’autres, le jeune-homme serait Démétrius, petit frère de l’empereur byzantin.

Derrière les Médicis se trouve le groupe des intellectuels.
Benozzo Gozzoli s’est représenté entre deux personnages barbus portant des chapeaux pointus. Il est lui-même coiffé d’un chapeau rouge, sur lequel est brodé en latin et en lettres d’or : « OPUS BENOTTI » (œuvre de Benozzo).
Le barbu à sa gauche est Teodoro Gaza.
Le barbu à sa droite est Gemisto Pietone
L’homme au bonnet rouge dans son dos est Enea Silvio Piccolomini.
Juste derrière lui, en turban bleu et portant une barbe, Giovanni Argiropulo.

I-B : Le décor de la chapelle est une commémoration à la gloire des Médicis.

Cette évidence justifie l’interprétation politique et l’attribution des dignitaires d’Orient pour l’incarnation des Rois mages.

Cette interprétation fait écho aux évènements de l’époque et notamment au concile de 1439. Ce concile est celui de la réunification entre l’église d’Orient et l’église d’Occident, l‘église orthodoxe et l’église romaine.

Côme de Médicis, intervint pour que ces manifestations aient lieu à Florence.
Cet événement diplomatique lui apporta un grand prestige.
Vingt ans plus tard, au moment de l’édification de la chapelle, le souvenir de cet événement est encore vif.

Les Médicis voulaient surpasser les Strozzi.

En représentant des activités nobles comme les cortèges et la chasse, les Médicis étalaient leur puissance. La famille recevait des diplomates étrangers et pouvaient leur montrer leurs fastes en les invitant dans la chapelle.

Benozzo Gozzoli a porté toute son attention sur les visages. Ils devaient être très ressemblants ; alors qu’il traite le paysage comme une toile de fond.

Naturellement, la famille suivait l’évolution des fresques avec attention.
Dans une lettre de Benozzo Gozzoli à Pierre de Médicis écrite en juillet 1459, le peintre réagit au mécontentement de son mécène :
« j’ai reçu ce matin une lettre de votre magnificence. je crois comprendre que les séraphins ne vous semblent pas satisfaisant… j’agirai selon vos ordres. Ils disparaîtront derrière deux nuages. »

Benozzo Gozzoli a réussi une mise en scène magistrale du pouvoir et de la splendeur de Médicis.

 

   II – Ces fresques sont une version mondaine du style gothique international

C’est probablement le commanditaire Pierre Médicis qui a imposé ce style.

 La famille Strozzi avait commandé à Gentile da Fabriano une adoration des mages pour son Palais…

Benozzo Gozzoli a observé le retable de Gentile da Fabriano et pour satisfaire son commanditaire s’appliqua à faire mieux.

La fresque du palais Medici-Riccardi est comparable à une luxueuse tapisserie.

Les arbres sont chargés de fruits, les prairies couvertes de fleurs émaillées, les oiseaux ont des plumages multicolores.

Le paysage vallonné est une variante un peu irréelle de la campagne florentine parsemée de villas médicéennes. On a le sentiment d’être devant un décor. Les arbres sont stylisés. Les rochers trop lisses -six siècles plus tard, suggèrent un décor de studio de cinéma.

L’étalement des atours est traité avec précision et raffinement.
Tous les personnages sont élégants, les pages comme les rois.

La perspective est étagée, indiquée par les changements d’échelles arbitraires.
Les arbres découpent l’espace et déterminent les groupes de personnages.

Les couleurs sont rutilantes. Les bleus et les verts, les rouges et les jaunes saturés sont plus intenses que sur toute autre fresque de la Renaissance.
L’emploi des rouges et des verts contrebalance les bleus et les ocres.
Les couleurs or et argent se superposent.
L’or pur en feuille est appliqué généreusement pour donner de l’éclat à la fresque vue à la lumière des bougies.
Avec les pigments vifs et coûteux, Benozzo Gozzoli a créé un univers riche qui saisit le regardant.
Le rendu est précieux.


Conclusion

Cette chapelle des mages est le plus bel exemple de peinture gothique à Florence au XVe.

Les nouveaux riches qu’étaient les banquiers italiens comme les Médicis étaient fascinés par la vie des aristocrates et leur goût pour les arts.

Pendant le XVe, les banquiers ont collectionné les œuvres peintes des peintres flamands.

Benozzo Gozzoli participe à la dynamique artistique de son époque, il montre de l’intérêt pour la manière flamande et la tradition narrative.

Sur les murs de la chapelle des mages du palais Médici-Riccardi se déroule un discours narratif calme et élégant dans une lumière limpide.

Le sens du récit et l’influence flamande amorcés par Francesco di Stefano Pesellino, s’épanouit avec Benozzo Gozzoli et trouve son aboutissement avec Domenico Ghirlandaio.

C’est l’originalité des fresques qui en font un chef-d’œuvre.

Cette originalité distingue le peintre dans son époque.

 Grâce à la bonne conservation et aux restaurations,
ces fresques remarquables sont inoubliables.

Niccolo Mauruzi da Talentino à la tête de ses troupes- 1456 – Paolo Uccello

 

Paolo Uccello (1397-1475)

 

 La bataille de San Romano

 L’œuvre se décline en trois tableaux :

 

 Niccolo Mauruzi da Talentino à la tête de ses troupes

 1456
Détrempe sur bois
Dim 317 x 182 cm

Conservé à la National Gallery à Londres

 

La contre-attaque décisive de Micheletto Attendolo de Contignolo

 1456
Détrempe sur bois
Dim 317 x 182 cm

Conservé au musée du Louvre à Paris

 

La défaite du camp siennois, illustrée par la mise hors combat de Bernardino della Ciarda

 1456
Détrempe sur bois
Dim 323 x 180 cm

Conservé à la Galerie des Offices à Florence.

 

Le peintre

À l’âge de sept ans, Uccello est apprenti dans l’atelier de Ghiberti où il côtoie, entre autres, Masolino et Donatello.
Uccello participe aux finitions de la première porte du baptistère de Florence que Ghiberti est en train d’achever.

En 1424, il entre avec Masaccio dans la compagnie des peintres de San Luca.
Uccello est formé à la peinture, à l’orfèvrerie et à la mosaïque.

Les vénitiens lui demandent de refaire les mosaïques de la basilique de San Marco -détruites dans un incendie. Ce travail durera cinq ans, puis il revient à Florence où s’opère une révolution picturale initiée par Brunelleschi et mise en pratique par Donatello et Masaccio.
Pendant plusieurs années il travaille sur des œuvres destinées aux cathédrales et aux églises florentines.

En 1436, il signe son premier travail monumental, une fresque magistrale : le Monument équestre du célèbre condottière anglais -John Hawkwood, que les italiens appellent Giovanni Acuto.

C’est à Florence qu’il peint le cycle commémoratif de la bataille de San Romano.
Et c’est à Florence qu’il meurt en 1475.


Le tableau

Le panneau étudié, Niccolo Mauruzi da Talentino à la tête de ses troupes, fait partie du cycle commandé par la famille Bartolini Salimbeni à Florence, pour commémorer une bataille entre Florence et Sienne, en 1432.

Laurent de Médicis imposa le  transport de  ces peintures, qu’il convoitait,  dans sa résidence.

La composition des trois panneaux se concentre sur l’épisode principal, le choc frontal du panneau des Offices, le seul signé par l’artiste.

Le panneau de Londres, celui étudié, est celui du signal de l’attaque et, l’intervention symétrique des autres troupes florentines conduites par Cotignola dans le panneau du Louvre, représentent deux mouvements qui convergent vers l’épisode central.

 

Composition

Au centre de la scène, sur un cheval blanc se trouve Niccolo da Tolentino, commandant de l’armée florentine victorieuse.

Cette composition permet à Uccello de mettre en valeur son expression de la monumentalité et de soigner sa perspective.

Le regardant a un point de vue central et légèrement surplombant.

À droite et à gauche les croupes des chevaux sont coupées par le cadre, cette traversée du cadre accentue l’illusion du mouvement de la gauche vers la droite et suggère que l’espace réel de la bataille est plus vaste que la scène montrée.

La scène se construit sur deux perspectives, une pour le premier plan linéaire et une pour le fond, étagée.

Le fond du tableau représente un paysage agreste de routes et de champs, ponctué de personnages.
Le plan perspectif se redresse et forme un paysage où l’on retrouve des références toscanes avec les collines en terrasse.
Les divisions et les cloisonnements façonnent la route et les champs en altitude et entrainent le regard entre les montagnes.
On croise des chasseurs, des chiens, du gibier.
Les personnages secondaires s’affairent en une série d’épisodes isolés.

Au premier plan, un chevalier en armure est au sol, face contre terre, son corps traité en raccourci, participe à la perspective.

Uccello structure le terrain dans un jeu de lignes et de volumes.
Les lances brisées, les casques et le cadavre au premier plan sont disposés avec une précision géométrique.

La dynamique des lances passant progressivement de la verticalité à l’horizontalité met en scène le choc frontal des deux cavaliers montés sur des chevaux blancs.

L’espace est découpé par les parallèles, les perpendiculaires et les obliques formées par les hampes et les lances. Toutes ces lignes convergent vers un pont de fuite dans le dos de Niccolo da Talentino et génèrent le rythme de la bataille.

Les casques et boucliers au sol, les jambes des chevaux dressés ainsi que les couleurs de leurs robes, traduisent le chaos de la scène.

C’est un combat d’armures, sans visages, seul Niccolo da Tolentino coiffé d’un mazzachio -couvre-chef florentin de bois et d’osier, sur son cheval dressé au centre de la composition a une apparence humaine.

Uccello utilise des couleurs brunies et des effets métalliques, argentures et dorures, laque et vernis. Il s’intéresse aux accessoires et à leurs matières, il travaille les miroitements pour donner des formes  agressives aux  armures .
Ces armures sont des points de repère dans la mêlée.
Les chevaux sont figés.
Ce sont les lances et les couleurs qui dynamisent la scène.
Le dégradé de bruns est cisaillé par les hampes et les lances blanches.
Au premier plan les chevaux forment une frise, un noir, un blanc, un noir et un blanc.  Les deux chevaux blancs se font face et sont cabrés.
Une deuxième rangée de chevaux bruns, double la rangée du premier plan.

La lumière entre par le haut, comme au théâtre.

Les casques des cavaliers en armures sont disproportionnés et font penser à des accessoires de théâtre, comme les attitudes figées des chevaux qui font penser à des chevaux de bois.

Paolo Uccello peint dans un style élégant un univers irréel, le regardant tente de reconstituer les figures.

 

Analyse

Outre les diverses représentations religieuses, les artistes italiens peignirent une vaste gamme d’œuvres profanes de commande, destinées aussi bien aux églises qu’aux édifices publics et aux résidences privées.

Certains commémoraient des victoires militaires, comme le cycle de Paolo Uccello consacré à la bataille de San Romano, d’autres illustraient des mythes antiques ou captaient des scènes de la vie quotidienne.

Paolo Uccello travaille sur le cycle commémorant la victoire des florentins sur les siennois, lors de la bataille de San Romano.

Le peintre exalte l’action militaire et politique.
Il met en scène les chevaux qui sont les attributs incontournables des chevaliers et incarnent les batailles et la guerre.

Avec ce cycle Paolo Uccello s’éloigne des peintres de la Renaissance qui accordent de l’intérêt aux personnages.
Ses cavaliers en pleine bataille sont des figures de théâtre.

I – Son œuvre est traversée par une réflexion passionnée sur la perspective linéaire.

Uccello est captivé par la perspective linéaire.

Dans son ouvrage, Vie des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes –1550, Vasari relate qu’Uccello travaillait jusque tard dans la nuit pour réussir le point de fuite d’une œuvre.
Il peint aussi des animaux, c’est à cet intérêt qu’il doit son surnom.
Uccello signifie oiseau.

La perspective linéaire n’est pas la perspective, mais un système conventionnel de représentation de l’espace.
Elle ne résulte pas d’une théorie établie.
Elle fait référence à la culture scientifique, géométrique et optique.

Uccello n’imite pas, il choisit dans l’espace réel des indices qui lui permettent d’exprimer ce qui l’intéresse.

Le peintre sollicite notre imagination, ce ne sont pas nos yeux mais notre regard qui interprète.

La bataille de San Romano est une œuvre centrale dans la production artistique du quattrocento.

II – La bataille offre une quintessence de la problématique de l’espace pictural.

Le champ de bataille est une surface plane et peu profonde.
Les combattants sont disposés autour du personnage central.
Un groupe compact de cuirassiers occupe le côté gauche.

Au deuxième plan une haie très touffue délimite le fond du champ de bataille et le sépare du paysage toscan qui forme le fond de la scène et couvre, les 2/3 du côté droit du tableau.

L’horizon de la scène se situe dans l’axe du tableau, au niveau des têtes des cavaliers.

La perspective linéaire ne fonctionne qu’au premier plan et associe plusieurs lignes de fuite.

Sur le sol différents objets et un cuirassier sont placés pour donner le sentiment de profondeur.

Le paysage du fond, dépourvu de profondeur, s’insère dans les lignes perspectives de la scène de combat.

La construction géométrique, comme la superposition des personnages et des jeux d’ombre et de lumière, donne le sentiment de profondeur.

Les jeux de lumière jouent un rôle essentiel, en intégrant le paysage à la scène de combat, ils réalisent l’unité de l’ensemble.


III – Paolo Uccello s’inspire des représentations théâtrales.

C’est la confrontation de la problématique picturale avec celle du théâtre qui amène Uccello à élaborer un système perspectif qui donne l’illusion de la profondeur sur une surface plane.

Il marie les décors des spectacles et du théâtre aux données scientifiques pour construire ses perspectives.

Les leçons qu’il tire de l’expérience scénique apparaissent de différentes façons dans ce tableau :
Le paysage du fond transpose picturalement les toiles peintes qui clôturent les scènes de théâtre ;
Traités comme des objets aux volumes pleins sur lesquels joue la lumière, les chevaux ont une plastique formelle et anonyme.
Les chevaux sont représentés sur le modèle d’un archétypes qui inspire, avec des variantes, les têtes de tous les chevaux.
Comme si Uccello avait reproduit des chevaux de bois.

Uccello instille plusieurs réalités théâtrales.
Il crée un nouvel espace plastique en conservant des repères culturels traditionnels comme les lances (symbolique militaire).

Le problème majeur que pose à la peinture sa relation avec le théâtre est la question de la représentation de la profondeur :

Comment donner l’illusion de la troisième dimension sur une surface plane.

 Le sentiment de volume des objets et des personnages naît des contrastes des couleurs sombres et claires et de leur plastique.

Une unique source de lumière et le jeu des ombres qu’elle projette, contribuent à l’homogénéité de l’ensemble.

Le contraste entre les blancs et les noirs donne une forte intensité psychologique.

Le raccourci créer avec le corps du cuirassier allongé sur le sol joue un rôle majeur dans la perception de la troisième dimension.

La bataille de San Romano occupe une place de choix dans  moment important de l’histoire de l’Art.

 

Conclusion

 Paolo Uccello occupe une situation marginale à Florence où un langage nouveau diffuse et auquel Uccello n’adhère pas.

S’il est une des personnalités les plus manquante de la Renaissance florentine, aux côtés de Masaccio et Piero della Francesca, il le doit à sa recherche permanente de la pureté de la forme et de l’expression.

Ses contemporains lui reprochent sa recherche systématique des règles.

À une époque dominée par l’ordre rationnel de Brunelleschi ou les conquêtes de Donatello et de Masaccio,
l’œuvre d’Uccello est dominée par sa passion de la perspective linéaire et témoigne d’un goût prononcé pour la plasticité des formes.