Madame Récamier-David

Jacques-Louis DAVID
(1748-1825)

Madame Récamier, née Julie, dite Juliette, Bernard

1800
Dimensions 174 x 224 cm
Huile sur toile
Conservé au Louvre

J-L David
1764-1773 formation
1774 il gagne le prix de Rome et part à Rome
1780 Retour à Paris
1781 Remarqué par Diderot le tableau Les funérailles de Patrocle est un succès
1782 il ouvre son atelier
1783 David est reçu à l’académie Royale de peintures et de sculptures avec
La douleur d’Andromaque
1785 Avec Le serment des Horaces David devient le chef de file de la nouvelle école de peinture, le néoclassicisme.
Parallèlement à sa vie de peintre, David mène une activité politique.
Il soutient Robespierre.
1790 il prend la tête de la « commune des arts ». Il obtient la fin du  contrôle du Salon par l’Académie des Arts et participe comme commissaire adjoint au premier « Salon de la Liberté ».
1792 il se radicalise
1793 il vote la mort du roi et peint Marat assassiné
1795-98 il peint les Sabines
Mis à mal pendant le Directoire, il est emprisonné
1797 il rencontre Bonaparte et se met à son service.
Il réalise pour lui sa plus grande composition Le sacre de Napoléon

Chef de file du mouvement appelé le néoclassicisme, David opère une rupture avec le style libertin de la peinture rococo du XVIIIe
Son oeuvre est constituée principalement de tableaux d’histoire et de portraits. Dans son atelier se sont formés de nombreux artistes venus de toute l’Europe, les plus célèbres de ses élèves sont Girodet, Gérard Gros et Ingres.

Au moment où David exécute son portrait, Juliette Récamier a 23 ans. Célèbre pour sa beauté et son esprit, elle réunit dans son salon parisien les plus grandes célébrités du monde politique, artistique et littéraire. Son salon sera fermé en 1803 sur ordre du gouvernement qui le considère comme l’un des principaux foyer de l’opposition au premier consul Bonaparte.

Composition

Le format horizontal est insolite pour un portait.
Ce format étant utilisé pour les tableaux d’Histoire.

David réalise un portrait sans décor ni artifice

Madame Récamier occupe le centre du tableau.
Elle est semi-allongée sur le coté, le haut du corps tourné vers le spectateur dans un mouvement de torsion.  Elle est vêtue d’une robe blanche à l’antique dont le bas retombe en drapé sur le sol. Ses cheveux  cours et bouclés sont ceints d’un large turban. Elle est pieds nus. Son bras gauche s’appuie sur deux coussins, le droit est posé sur sa jambe .Le mouvement du torse et son regard animent le tableau et rendent le portrait vivant.

Le cadre est dépouillé. Au pied de la méridienne un tabouret et à gauche du tableau un candélabre ces meubles pompéiens sont caractéristiques du style « empire » qui est à l’avant garde de la mode

Le  haut du candélabre marque le départ d’une diagonale qui suit la ligne du corps et donne à la composition son équilibre.
David crée un espace autour de la jeune-femme qui met en valeur l’arabesque élégante du corps.
L’harmonie claire de l’ensemble est valorisée par les tons chauds des meubles.

Le tableau est inachevé : les accessoires, les murs et le sol sont restés à l’état de frottis avec des accords de bleu de jaune d’ocre et de brun pour le fond et un frottis léger et vibrant pour le sol.

La facture de ce tableau échappe  au néoclassicisme, ce n’est pas un tableau au rendu lisse.

Analyse

Le portrait rompt avec les portraits traditionnels qui sont plus resserrés sur les visages des modèles.
David crée une distance entre le spectateur et la jeune-femme.
Le mobilier et la robe sont d’une grande simplicité.
La sévérité de l’antique est atténuée par la grâce du modèle, les courbes souples des bras, des lignes du dos et du cou, ainsi que par le délicat visage au regard profond.

Il s’agit d’un portrait idéal d’une époque qui s’exprime à travers une simplicité recherchée et un goût raffiné.
Madame Récamier représente la nouvelle société, symbole de l’ascension sociale, elle est l’image d’une grande bourgeoise, l’image d’un monde neuf, sans origine.

David d’abord comme portraitiste minutieux des notables de l’ancien régime (Portrait de Lavoisier et de sa femme) réalise ici un portrait à la psychologie subtile et peint un tableau au « singulier mélange de réalisme et d’idéal » jugera Delacroix.

Par la volonté de David, le tableau restera inachevé.
Il dira « Madame les femmes ont leurs caprices, les artistes aussi. Laissez moi satisfaire le mien. Je laisse votre portrait dans l’état où il se trouve ».
Le portrait est parfait et son inachèvement est devenu esthétique.

Madame Récamier a commandé un autre portrait au peintre Gérard.
Achevée en 1805, l’oeuvre plus maniérée met en lumière la modernité du portait de David.

Parce qu’il a mêlé avec passion son engagement politique et son oeuvre de peintre, David fut l’un des artistes les plus admirés et les plus honnis de son temps.