Le Médecin – 1653 Gerrit Dou

Gerrit Dou (1613-1675)

 

Le Médecin

1653

Huile sur panneau

Dim 49,3 x 36,6 cm

Conservé en Autriche, à Vienne, au Kunsthistorisches Museum

 

Le peintre

Gerrit Dou est issu d’une famille d’artisans. Fils et élève d’un graveur sur verre, il apprend la gravure sur cuivre et la peinture sur verre avant de devenir en 1628, à l’âge de quinze ans, le premier élève de Rembrandt. Son talent s’épanouit durant trois ans sous la direction de Rembrandt. Rembrandt lui enseigne la maîtrise des couleurs et l’art du clair-obscur. Rembrandt a une influence profonde sur le style et la compréhension de l’art de Gerrit Dou.
Les œuvres de Gerrit Dou sont un hommage à la beauté subtile du quotidien.
Sa technique proche de l’émail lui vaut une renommée internationale.
À Leyde, sa ville natale, il fonde l’école des peintres fins constituée en guilde à partir de 1648. École où la peinture s’apparente à la miniature (enluminure). Parmi ses nombreux élèves, il forme Frans van Mieris et Gabriel Metsu.

Gerrit Dou préfère peindre sur des panneaux de bois et se sert d’une loupe pour le fini des détails. Il a créé de nombreuses études de caractères minuscules.

Ses œuvres sont conformes aux goûts de son époque.

 

Le tableau

C’est un tableau de petit format.
Ce petit format est une particularité du peintre ainsi que son style minutieux, qui l’oblige à travailler lentement.

Autre particularité, ces tableaux sont généralement surmontés d’un encadrement en forme d’arc en trompe-l’œil.

Ce tableau est une peinture de genre.
Gerrit Dou puise son sujet dans la vie quotidienne et le cadre dans un espace sombre et étroit.

 

Composition

Le médecin apparaît dans l’embrasure d’une niche richement sculptée, avec un bas-relief inférieur où un chérubin s’amuse avec une chèvre.
Ce bas-relief est inspiré du sculpteur François Duquesnoy (1597-1643).

Au premier plan, sur l’étagère soutenue par le bas-relief, une frise d’objets, tous sont traités avec virtuosité : un tapis soyeux, un récipient en métal rutilant, une amphore et un livre d’anatomie aux pages cornées.

Au second plan et dans l’axe du tableau, un docteur examine une fiole à la lumière, tandis qu’une jeune femme près de la fenêtre l’observe avec inquiétude.

Le peintre utilise de façon appuyée le clair-obscur.
Le fond est sombre, la scène se détache dans la lumière.

Aucune touche de peinture n’est visible et les reflets de la lumière sont traités avec une précision d’orfèvre.

Gerrit Dou utilise les couleurs brillantes de la technique sur verre pour obtenir un rendu final proche de l’émail.

 

Analyse

Gerrit Dou ouvre une fenêtre réaliste sur la vie du XVIIe.

Ce tableau véhicule une idée susceptible de correspondre aux goûts des collectionneurs de l’époque :
Le charlatan qui extorque de l’argent aux crédules.

 I-   Gerrit Dou peint un personnage type.

Les bases du genre furent posées au XVIe par Pieter Bruegel l’Ancien.
C’est au XVIIe que ce genre s’est imposé comme forme populaire répandue.

Caravage s’en empare, ses représentations du bas peuple urbain, ses tableaux peuplés de joueurs, de voyous et de vagabonds en costumes fantaisistes font mouche.

Le centre de la peinture de genre sont les Provinces-Unies (aujourd’hui Pays-Bas). Cette peinture nous fait entrer dans les maisons néerlandaises de l’époque, nous montre la vie de leurs habitants.

 II-   Sa peinture est délicate et minutieuse.

Gerrit Dou traite sa scène avec un perfectionnisme rare. L’excellence est sa préoccupation majeure.

Gerrit Dou peint très lentement, sa technique raffinée et complexe nécessite un travail plus long que la moyenne. Dou reçoit des revenus réguliers de ses mécènes (deux financiers de Leyde qui en échange bénéficient du droit d’acquérir les œuvres qui leur plaisent et de refuser celles qu’ils n’apprécient pas.)

Gerrit Dou recherche la beauté.

L’exécution méticuleuse dissimule la trace du pinceau.
La soigneuse et habile pénombre, adoucie et subtilement caressante est un clair-obscur hérité de l’enseignement de Rembrandt.
Ses couleurs sont propres et harmonieuses.
Avec la soierie posée sur le bord de la niche, Gerrit peint un de ses motifs d’exécution picturale favori.

L’apparente absence du travail pictural souligne, paradoxalement, sa manière et sa touche miraculeuse.

Le moelleux de la touche, les jeux subtils de la lumière, la délicatesse de la palette et le rendu des textures, donne au regardeur l’impression d’être devant un photographie.
Harmonie, cohérence, justesse des proportions et des couleurs sont essentielles au ressenti du regardeur.

Gerrit miniaturise sa scène de genre.
Sa peinture est minutieuse, détaillée et, anecdotique.


III-   Ce tableau véhicule un message moral.

Il condamne les prétendus guérisseurs.

La scène du bas-relief (sur le thème de la tromperie), la tenue pittoresque du médecin et son geste ritualisé, devaient permettre aux regardeurs de l’époque d’identifier aisément le sujet du tableau.

Dou exprime une multitude d’émotions et de nuances.

Le tableau a une dimension communicationnelle. Il a un sens.
Il exprime l’intention du peintre.

Dou s’interroge sur son identité artistique.

Dans un autre tableau Le Charlatan –1652, il évoque le même motif. Dans Le Charlatan il traite le sujet frontalement et avec humour. Dans Le Médecin –1653, le sujet est sous-entendu.

Dou fait un parallèle avec l’aspect trompeur de l’art, sa capacité à convaincre le regardeur de la réalité de la représentation.

Dou fait passer un message : par la sollicitation mensongère du regard, la peinture ressemble au charlatanisme.

Dou forge un art de l’illusion.
Dou souhaite être perçu comme excessivement méticuleux et secret.

 

Conclusion

Gerrit Dou est un artiste réaliste hollandais dont le style incomparable en fait un des grands représentant de la peinture de genre de l’Europe du Nord.

Gerrit Dou est l’une des principales lumières de la peinture baroque néerlandaise.

Connu pour son profond amour du détail et ses techniques picturales exquises, Gerrit Dou est entré dans l’Histoire comme le fondateur de la peinture fine de Leyde.

De nombreux peintres ont trouvé l’inspiration dans l’œuvre de Gerrit Dou.

Il a Laissé environ 200 œuvres dont les principales sont au Rijksmuseum (Amsterdam), au Musée du Louvre (Paris) et la National Gallery (Londres).